Quand on se lève un beau matin pour trouver dans sa boîte aux lettres le disque preview de la version Playstation 3 d'un titre aussi attendu que Deus Ex: Human Revolution, on se dit que la journée commence bien. Dix jours de tête à tête avec Adam Jensen plus tard, il faut se rendre à l'évidence : attendre la fin de l'été pour enfin pouvoir poursuivre l'aventure risque d'être un peu plus difficile que prévu. On pourrait d’ailleurs presque s'en tenir à ce constat, mais on ne voudrait pas vous priver d'une de ces previews dont Gamersyde a le secret. Chronique d’un hit annoncé juste après l’indispensable clic de souris.
Detroit, 2027. Les choses ne vont pas si mal pour la société Sarif Industries, sur le point d'annoncer une découverte de première importance, à une époque où l'être humain a recours aux augmentations biotechnologiques. La science n'a en effet pas chaumé en 16 ans, mais comme toute médaille a son revers, la vie d’une personne augmentée a un prix : la neuropozyne. Obligatoire pour éviter un rejet, et donc la mort pour tous ceux dont l’augmentation a sauvé la vie, ce médicament demande un compte en banque conséquent pour se le procurer. Sarif Industries se réjouit donc d’annoncer publiquement la découverte qui va permettre à tous de profiter des bienfaits des augmentations, une découverte qui va rendre la neuropozyne inutile. Evidemment, tout ne se passe pas comme prévu et Sarif Industries subit une attaque sans précédent, mais pas sans conséquences…
Une entrée en matière qui a bien sûr valeur de tutorial mais qui a aussi pour but de poser les bases d’une histoire complexe. Adam Jensen, personnage principal de son état, est chargé de la sécurité de Sarif Industries mais on comprend aussi rapidement que lui et Megan Reed, la scientifique à qui l’on doit la fameuse découverte, ont été très proches. La fin de ce prologue marque un double échec cinglant pour Jensen puisqu’il faillit à sa tâche en ne protégeant, ni la société de son employeur, ni son ancienne petite amie, victime parmi tant d’autres dans les rangs des scientifiques. Jensen n’est d’ailleurs pas loin de la rejoindre ad patres mais c’est sans compter la ténacité de David Sarif qui met tout en œuvre pour le remettre sur pied. L’occasion d’un générique de grande classe admirablement mis en scène, et sublimé par l’excellente bande originale du jeu. Prometteur !
Les choses sérieuses commencent six mois plus tard, au retour de Jensen à Sarif Industries, mais cela vous le découvrirez par vous-mêmes. Pas question en effet de tout vous raconter dans le moindre détail, il est maintenant temps de se pencher sur le contenu du jeu et sa structure. Deus Ex Human Revolution se voulant le digne héritier de la célèbre franchise, il se devait de proposer un univers dense et un vrai sentiment de liberté. La liberté de choisir l’ordre des missions que vous devez effectuer, mais aussi celle de les aborder de la façon dont vous le souhaitez. Mission accomplie, qu’il s’agisse des quêtes principales ou secondaires, jamais le joueur n’est posé sur des rails dont il ne peut sortir. Si vous êtes plutôt du genre réservé, vous préférerez sans doute éviter les feux des projecteurs (et celui des armes ennemies au passage). Si c’est plutôt la poudre que vous aimez faire parler, pas la peine de perdre votre temps en palabres inutiles, votre arsenal étant suffisamment bavard pour tailler la bavette avec vos adversaires. Avec Deus Ex, on joue comme on aime.
Cette volonté de laisser le joueur libre de son expérience se retrouve jusque dans les options de jeu, puisque tout y est paramétrable : de l’affichage des objectifs à la mise à couvert (qui peut soit s’effectuer en maintenant le bouton L1 enfoncé, soit en appuyant une fois sur cette touche pour passer du mode de couverture à la vue FPS et inversement) en passant bien sûr par l’activation ou désactivation du halo lumineux de réalité augmentée. Ce dernier n’est d’ailleurs pas aussi intrusif qu’on pouvait le penser, et s’il est vrai qu’il permet une lecture plus rapide des lieux (les objets interactifs apparaissant en surbrillance), il ne donne pas spécialement l’impression de prendre le joueur par la main. De plus, comme le reste du HUD, cette feature optionnelle est totalement intégrée à l’univers et à l’histoire de Deus Ex Human Revolution.
Et parlons-en un peu de cet univers cyberpunk revisité suffisamment pour le rendre crédible. La ville de Detroit où débute l’aventure est la parfaite image de ce monde où le clivage entre riches et pauvres, augmentés ou non augmentés se retrouve à chaque coin de rue. Clochards, prostituées, employés de bureau ou simples flics, tous discutent ou vaquent à leurs occupations, donnant vie aux ruelles mélancoliques de la cité américaine. Un sentiment de solitude et d’inquiétude se dégagent d’ailleurs lorsque l’on déambule au hasard d’une impasse, le vent frais faisant voler les papiers comme autant de désillusions d’une population en proie au doute et à la division. Difficile en effet d’évoluer dans cette société où les pro-humains voient d’un très mauvais œil les avancées de la science en matière de biotechnologie.
Chaque tâche demandée permet une multitude d’approches qui dépend souvent des aptitudes choisies par le joueur. Des aptitudes qu’il est possible d’obtenir via ce que l’on appelle les points PRAXIS, qui s’acquièrent en gagnant de l’expérience ou en les achetant à la clinique locale (pour la somme rondelette de 5000 crédits tout de même). Camouflage optique, smart vision (pour voir à travers les murs), amélioration de saut, de la taille de l'inventaire (géré à l'ancienne avec une système de cases façon Resident Evil), force, capacité en hacking, la liste est longue (et coûteuse !). Selon que l’on pourra ou non atteindre certaines hauteurs, ou encore déplacer un objet lourd barrant le chemin, l’itinéraire emprunté pourra donc changer. Il est également possible de faire jouer le pouvoir des mots, en conversant avec un informateur ou un ancien collègue du Swat, à condition bien sûr de les choisir sagement.
Assez tôt dans l’aventure, le joueur doit trouver un moyen d’accéder à la morgue et pour ce faire, plusieurs choix s’offrent à lui : convaincre un flic de le laisser entrer (via un dialogue à choix multiples) ou bien tenter l’entrée par effraction en toute illégalité. Si la première option permet la libre circulation dans le commissariat, attention à ne pas être pris en train de forcer la porte d’un bureau pour y récupérer un indice important. L’infiltration, elle, peut se faire à partir de différents points d’entrée que nous ne dévoilerons pas ici. D’autres missions vous permettront évidemment d’opter pour une approche plus radicale, et là encore, certaines augmentations débloquées autorisent de bien jolies choses. Savant mélange entre le héros néo matrixien et le Terminator, je vous laisse imaginer l’état dans lequel vous pourrez laisser vos adversaires.
C’est sans nul doute l’approche non léthale qui vous demandera le plus de temps et de patience, mais quel plaisir de préparer un plan d’approche en observant les gardes et les alentours pour repérer les plus petites failles du périmètre. Jouer au fantôme n’est d’ailleurs pas sans rappeler les meilleurs moments de Splinter Cell, Thief ou encore Metal Gear Solid, avec ces corps qu’il faut dissimuler à l’abri des regards, ces caméras à contourner et ces pas qu’il faut savoir garder feutrés. Armé d’un fusil tranquillisant, d’un taser ou de vos simples poings, vous ne serez même pas contraint d’y avoir recours si vous préférez vous glisser au nez et à la barbe de vos ennemis en évitant tout contact.
Le contraire de l’approche plus brutale dont Jonathan Jacques-Belletête nous avait aussi fait la démonstration il y a quelques semaines. Dans ce cas de figure, Deus Ex Human Revolution revêt les apparats plus classiques du first person shooter (le système de couverture à la troisième personne en plus), mais n’en demeure pas moins exigeant, même en mode normal. Vous ne résisterez en effet pas longtemps aux balles ennemies et l’indigestion de plomb ne se fera pas prier longtemps. La preview se terminait d’ailleurs sur un premier boss pour le moins explosif : un gros malabar augmenté qui avait pris part à l'attaque de Sarif industries. Un premier combat réellement obligatoire qui donnait d'ailleurs pas mal de fil à retordre dans le mode de difficulté le plus élevé.
L’Amadeus du jeu vidéo ?
S’il est sans doute un peu tôt pour parler de prodige ou de génie, Eidos Montréal a accompli un travail méticuleux pour donner vie à l’univers de Deus Ex Human Revolution. La bande son est à ce titre des plus réussies et nous plonge avec maestria dans l’ambiance futuriste d’un monde dirigé par les multinationales de biotechnologie. Doté qui plus est d’un scénario accrocheur et de personnages charismatiques, il nous tarde vraiment de découvrir le fin mot de l’histoire. Malgré tout le sérieux qui habille sa toile de fond, Deus Ex Human Revolution n’oublie cependant pas les petits clins d’œil amusants, comme ce poster de Final Fantasy XXVII dans un des bureaux de Sarif Industries, ou les caméras de surveillance ‘Big Bro’. Et s’il vous prenait l’envie pressante d’aller fouiller les toilettes des dames, ne soyez pas surpris si, plus tard, Pritchard (responsable de la sécurité informatique) vous rappelle que malgré toutes les modifications apportées à votre corps, vous êtes bien toujours un homme.
Autre point digne des plus grandes éloges, la direction artistique sans faille qui apporte beaucoup dans l’immersion. Elle compense d’ailleurs largement l’aspect graphique, en deçà des autres productions du genre. Si les décors sont riches en détails, avec des intérieurs fournis qui ne sont d’ailleurs pas sans rappeler ceux de Metal Gear Solid 2 (les pastèques en moins), les textures sont généralement assez simplistes et donnent au jeu un rendu très clinique. Décevante aussi la modélisation des PNJ qui est malheureusement assez loin des standards actuels. Les phases de dialogue mettent d’ailleurs bien en évidence ces lacunes, les visages ne faisant pas passer assez les émotions des différents protagonistes. Ceci étant dit, le jeu sait aussi réserver de belles surprises avec des environnements réussis comme par exemple l'appartement de Jensen dont les volets s'ouvrent automatiquement à son arrivée (l'occasion de jeux de lumière particulièrement réussis).
Cette version preview n’était pas non plus exempte de reproches en ce qui concerne le framerate, un peu malmené parfois, mais sans que cela n’affecte jamais la jouabilité du titre. Il est cependant plus que probable que la version finale corrige le tir à ce niveau puisque Jonathan Jacques-Belletête nous avait confié que le jeu était terminé et que les mois qui viennent seraient consacrés à l’optimisation du jeu. Bon point sur l'IA par contre, qui se montre déjà très attentive au moindre bruit, voire même à la première touffe de cheveux qui dépasse malencontreusement d'une caisse ou d'un bureau. À la manière de Metal Gear (encore lui), un bruit ou un mouvement suspect mettra les gardes en état d'alerte, mais ce n'est qu'une fois Jensen découvert qu'ils passeront réellement aux hostilités. Restez caché suffisamment longtemps et ils retourneront à leur ronde en se disant qu'ils s'agissait certainement de leur imagination débordante.
Rien à dire sur le doublage de la version originale, toujours dans le ton et, pour ceux qui ne rechignent pas à jouer avec des sous-titres anglais (la version preview ne permettant pas de modifier la langue de ces derniers), il ne faudra pas longtemps avant de tomber sous le charme du timbre cassé d’Adam Jensen. Côté VF, le travail est soigné mais parfois inégal. Lors du briefing dans l’hélicoptère qui précède la première mission, Jensen fait preuve d’un ton agressif un peu caricatural. Un petit écart qui ne se répète heureusement pas dans les quelques heures de jeu auxquelles nous avons pu nous essayer. Plus ennuyeux pour les francophones, la synchronisation labiale est très décevante, cassant légèrement l’immersion quand on se focalise sur les lèvres des personnages. Comme à son habitude, la version française perd également certains accents, comme celui du très hispanique Zeke Sanders, chef de bande des puristes. Des détails dans un tableau des plus positifs certes, mais que nous tenions malgré tout à mentionner.
Tous les commentaires (49)
J'espère qu'en mettant la 360 en anglais on pourra avoir la VO, vu qu'à mon avis on pourra se brosser pour avoir l'option dans le jeu...
En tout cas la fin du mois d'août n'aura jamais parue aussi lointaine ^^
Comme toi, et même sans y avoir jouer, il me tarde de mettre la main sur le sésame.
Je suis bien heureux de voir que liberté il y aura, que l'IA se débrouille bien, que l'action est exigeante autant que l'infiltration et surtout que l'univers est bien cohérent et développé avec en appui un excellent travail sonore et que le scénar semble prometteur. Pour couronner le tout le HUD est entièrement paramétrable. Très bon travail tout ça.
ps: Pour la voix originale de Jensen on l'aime déjà :).
L'attente sera longue pour replonger dans cet univers si inquiétant, mais pourtant si fascinant et magique.
Ah non, c'est Duke, ça... :p
Mais Deus Ex possède lui un gameplay à choix multiples, mais pas que dans les dialogues... :)
Bref c'est plutôt vers ça que BioWare devrait lorgner, plutôt que simplifier de plus en plus et arriver à un résultat limite bâtard sur ses dernières prod.
Pour ME2 par contre... c'est plus un jeu d'action qu'un RPG donc bon... mais c'est a EA qu'il faut en vouloir, plus qu'à Bioware...
Autre chose, Je vois souvent des gens qui utilisent le terme FPS sans apparemment trop savoir ce que cela signifie, Ce n'est pas problématique mais je préfère revenir dessus pour informer.
FPS ne veut pas dire jeu de shoot mais bien que la vu est de l'interieur du personnage. First Person Shooter. Contrairement aux TPS = Third Person Shooter qui dans ce cas est un gameplay ou on voit le personnage. (ME justement etc...) Voilou . :)
Pour Deus Ex HR, ça tape plus ou moins dans la même catégorie oui, dans un genre différent et avec une approche différente. Mais est-ce que ME devrait s'en inspiré? C'est pas si évident. A une période où l'on reproche aux Japonais d'occidentalisé leur BTA ou RPG; on peut se demander si c'est pas mieux que chacun garde sa vision et son traitement d'un genre ou d'une histoire. Notons aussi qu'on en est encore à vouloir ranger les jeux par cases de genre et qu'ils correspondent bien à la case. Pas d'écart au genre tolérés.
Mais Deus Ex possède lui un gameplay à choix multiples, mais pas que dans les dialogues... :)
Bref c'est plutôt vers ça que BioWare devrait lorgner, plutôt que simplifier de plus en plus et arriver à un résultat limite bâtard sur ses dernières prod.
(on s'en fout des vues, je crois que tout le monde ici connait la différence FPS/TPS ^^ et tout le monde a aussi pleinement conscience qu'il ne s'agit au final que de buter de l'ennemi avec une arme à feu dans les deux cas)
Et non on ne se fout pas des vues, surtout quand il y a de l'infiltration en jeu.