Il n'est pas dit que vous ayez déjà entendu parler de Mundaun, et nous sommes en partie responsables puisque nous n'avons effectivement pas suivi la communication autour du jeu ces dernières semaines. Pour autant, comme notre curiosité n'est certainement pas un vilain défaut, nous avons eu envie de tenter l'expérience pour partager avec vous notre ressenti, par écrit et en vidéo, dans un tout nouveau Gamersyde Offline.
Quand Curdin apprend la mort de son grand-père dans des circonstances affreuses, il n'hésite pas une seconde, il se met en route pour le village de Mundaun, dans les Alpes suisses, en quête de réponses. À son arrivée, le mystère s’épaissit, le comportement étrange du curé du village soulevant tellement de questions que Curdin entreprend de tirer les choses au clair. Une apparition quasi spectrale et une conversation avec le prêtre Jérémias plus tard, on commence à sentir que quelque chose ne tourne pas rond à Mundaun. Avant même que le séjour ne commence à vraiment tourner au vinaigre, le folklore local pèse de tout son poids sur le jeune visiteur, jusqu’au moment où les meules de foin prennent vie, où des manifestations surnaturelles apparaissent à la petite chapelle. À partir de cet instant, Curdin va plonger dans le sombre passé de son aïeul pour comprendre quelle malédiction touche la bourgade isolée, et surtout, pourquoi. Mundaun s’aventure donc sur le terrain accidenté du jeu d’aventure horrifique dans une ambiance de mythes et légendes alpines qui lui donne toute sa singularité. Les bases du gameplay reposent essentiellement sur l’exploration, mais le jeu inclut également quelques mécaniques supplémentaires, comme la conduite (sommaire) de véhicules, l’infiltration (tout aussi sommaire), la réflexion (très modérée) et l’action maladroite (en toute fin d’aventure). Décrit comme cela, on pourrait croire que Mundaun fait plutôt partie des titres à éviter, même en période creuse, mais ce serait aller un peu vite en besogne.
Certes, des points de vue purement mécanique et technique, le jeu de Michel Ziegler est parfois un peu brut de décoffrage, avec des déplacements et des interactions qui manquent de souplesse, et qui trahissent les origines indépendantes du projet. Le jeu intègre une gestion de la santé mentale, de la forme physique du héros et de sa capacité à utiliser une arme à feu, mais rien n'est jamais véritablement expliqué très clairement. Au contraire de titres comme Amnesia par exemple, l’état psychologique du personnage ne se détériore pas avec le temps et en fonction des événements. En fait, comme pour les autres jauges, il est juste possible de la remplir afin de permettre à Curdin de mieux maîtriser ses émotions. Pour gagner en force mentale, il faut trouver du café et de l’eau, puis préparer le tout dans un récipient que l’on transporte sur soi, à condition d’avoir récupéré du bois et des allumettes pour le chauffer. La force physique dépend de la nourriture que l’on déniche (souvent derrière des portes closes dont il faudra trouver la clef) tandis que l’art du tir à la carabine s’apprend via des manuels militaires, comme dans The Last of Us. Tout ceci a simplement pour but de vous rendre la vie un peu plus facile, notamment quand Curdin se retrouve face à des ennemis qui ont tendance à l'immobiliser sur place quand il est tétanisé par la peur (avant de le tuer et de le ramener au dernier point de sauvegarde), mais il n’est en aucun cas obligatoire de faire évoluer le héros pour progresser dans l’histoire.
L’aspect infiltration se limite quant à lui au minimum, avec la possibilité de se mettre accroupi, sans que cela soit réellement nécessaire pour éviter les patrouilles. Curdin dispose également de la pipe de son grand-père, pratique dans certains cas, mais aussi d’une lanterne qu'il récupère à partir d’un point clef de l’aventure. Quand le jeune homme ne se déplace pas à pied, il a accès au Muvel, une sorte de mini-camionnette qui sert à transporter le foin, mais il la troquera pour une luge une fois les sommets de Mundaun atteints. Dans les faits, à part permettre de couvrir les distances plus rapidement, ces moyens de transport ne changent pas vraiment la donne, mais on apprécie néanmoins l’intention de rendre certains allers-retours moins pénibles qu’ils ne l’auraient été à pied. Les quelques énigmes rencontrées ne devraient pas vous demander beaucoup d’efforts, puisqu’elles sont généralement étroitement liées à l’exploration des lieux, mais elles participent à vous mettre dans l’ambiance, tout comme les différents ennemis croisés d’ailleurs. Et c’est clairement là que se situe la force de Mundaun, dans sa capacité à créer une atmosphère étrange et inquiétante et à raconter une histoire dont on ne sait pas comment elle va bien pouvoir se terminer. À ce sujet, anticiper le dénouement probanle est d’autant plus délicat pour le joueur que 5 fins distinctes sont annoncées, dont (on l’imagine) la plupart ne seront pas spécialement heureuses. Et on parle en connaissance de cause, puisque notre pauvre Curdin ne sera pas sorti indemne de toutes les péripéties qu’il aura rencontrées. À plusieurs reprises dans l’aventure, des choix cruciaux devront être faits, ceux-ci influant évidemment sur la conclusion que vous obtiendrez, donnant à l'expérience un côté un peu plus personnel.
Si l’atmosphère de Mundaun est réussie, c’est qu’elle peut s’appuyer sur une bande son relativement efficace, bien que parfois trop discrète, mais surtout, sur une direction artistique totalement unique. En apparence, le jeu n’arbore pas des modèles de personnages très détaillés. À dire vrai, ils sont même assez anguleux, et leurs animations restent très limitées. Mais quand on y regarde de plus près, on comprend que tout ce que l'on découvre sous nos yeux sort directement du carnet à dessin de son auteur. Michel Ziegler a en effet reproduit dans Mundaun tous les croquis qu’il a confectionnés pendant le développement, poussant le vice jusqu’à les utiliser pour les textures des décors, des monstres et des personnages. Tout dans Mundaun a donc été dessiné au crayon à papier (ou au crayon gris comme on dit par chez-moi), pour un rendu vraiment très réussi (surtout en intérieur, où on le remarque sans doute plus facilement). Dès la page d’accueil du jeu, on voit que l’on a affaire à un titre à l’approche visuelle très particulière. Cela ne sera clairement pas du goût de tous, mais c’est un constat que l’on peut de toute façon faire pour le jeu dans sa globalité. C’est en tout cas ce qui démarque très clairement Mundaun des autres productions indépendantes du genre. On ne sait pas si cela suffira à faire parler de lui, mais l’idée est vraiment excellente et certains passages sont particulièrement réussis artistiquement parlant.
Techniquement, le moteur Unity est encore une fois à l'œuvre, et s’il permet une certaine flexibilité, il n’est pas toujours simple à optimiser pour les jeunes studios. Même sur un bon PC (i9 9900k, RTX 2080 Ti), les performances ne sont pas parfaites en 1440p, et à cela il faut aussi ajouter quelques passages où le pop-up du décor peut être assez agressif (c’est rare heureusement). Plus ennuyeux, nous avons également rencontré des bugs plus ou moins bloquants. Nous nous sommes par exemple retrouvés bloqués en sortant du Muvel, nous obligeant à recharger notre dernière sauvegarde. Précisons que quand nous avons reçu le jeu il y a 2 semaines, il nous était possible de sauvegarder notre progression à n’importe quel moment via le menu du jeu, mais que l’option a finalement été enlevée dans le dernier patch en date que nous avons reçu - sans doute pour justifier l’utilisation des horloges, qui font donc office de points de sauvegarde. Le bug dont nous avons fait les frais a peut-être été corrigé à cette occasion, mais si nous n’avions pas fait de sauvegarde manuelle quand il nous est tombé dessus, nous en aurions été gré pour refaire une portion de jeu plus importante (les checkpoints n’étant pas si fréquents que cela). Autre bug, post-patch lui, impossible de rappeler une nacelle en appuyant sur le bouton prévu à cet effet. Rien de dramatique puisque la zone où nous voulions nous rendre restait accessible à pied, mais cela nous a tout de même agacés sur le moment. Sur 7h30 de jeu, ce sont vraiment les seuls problèmes auxquels nous avons dû faire face, il n’y a donc pas de quoi crier au scandale, mais nous tenions à les évoquer malgré tout car il en existe peut-être d'autres.