Depuis quelques années déjà, la scène indépendante s'intéresse de près à la place de la narration dans le jeu vidéo, celle-ci allant même parfois jusqu'à prendre le pas sur le gameplay, essence même du médium. On pense par exemple à Dear Esther, sorti il y a plus d'un an et demi déjà, mais également à The Stanley Parable, avec lequel le jeu de The Chinese Room partage quelques similitudes, à commencer par le moteur qu'ils utilisent tous les deux.
Note : Une fois n'est pas coutume, nous déconseillons à toute personne intéressée par le titre de Galactic Cafe de regarder les deux vidéos de gameplay, les deux autres extraits suffisant largement pour se faire une bonne idée de l’atmosphère du titre.
MAJ : Le prix du jeu est désormais connu, 9.59€ pour le lancement (11.99€ pour le prix de base).
Réussite imparable
Issu du travail réalisé par Davey Wreden sur un mod basé sur le Source Engine de Valve, The Stanley Parable s'apparente à une expérience narrative interactive dans laquelle le gameplay s'avère au final très limité. Dans la peau de Stanley, employé de bureau anonyme sans histoire, il vous faudra en effet vous contenter de choisir votre chemin, la moindre de vos décisions étant commentée par la voix d'un narrateur omniscient déterminé à garder le contrôle de l'histoire qu'il raconte. Plus proche de la tranchante causticité de Glados que de la diction mélancolique du narrateur de Dear Esther, la voix de Kevan Brighting est sans aucun doute pour beaucoup dans la réussite de ce titre sans réel équivalent. La justesse du ton, la folie maîtrisée avec laquelle il fait vivre son texte, tout participe à plonger le joueur dans un univers aussi décalé qu'intéressant sur le fond. On touche d'ailleurs là au deuxième point fort de The Stanley Parable, la très grande qualité de son écriture, qui nous amène à nous interroger sur la relation entre le joueur et le level designer, entre autres choses. Intelligent, subversif et drôle, le scénario tordu de Davey Wreden a en plus le mérite de proposer différents embranchements, chacun d'entre eux permettant de découvrir un nouveau pan du message véhiculé par le jeu.
Les différentes fins sont heureusement suffisamment nombreuses et intéressantes pour rendre plusieurs parties totalement indispensables. Le jeu ne s'y trompe d'ailleurs pas, puisque celui-ci se relance inlassablement sans nous demander notre avis, comme si nous nous trouvions prisonniers d'une boucle temporelle interminable, à la manière de Phil Connors dans le film d'Harold Ramis. Tout le génie de The Stanley Parable tient dans la confusion qu'il parvient à semer dans nos esprits, avec par exemples des retours au début de l'aventure qui n'en sont pas toujours, le narrateur tentant tant bien que mal de corriger les erreurs de Stanley. Conséquence, on ne sait jamais vraiment à quoi s'attendre ni sur quel pied danser. Alors que les mécaniques de jeu se limitent finalement à avancer en écoutant la voix ou en lui désobéissant, la manière dont Wreden parvient à briser allègrement le quatrième mur rend son jeu totalement addictif et parfaitement maîtrisé. L'envie de découvrir jusqu'où le jeune développeur est allé prend alors le pas sur tout le reste, et c'est sans se faire prier que l'on poursuit sa progression, guettant chaque nouvelle intervention du narrateur. Inutile de préciser que cette rejouabilité du jeu enrichit énormément le propos du jeu lui-même.
Orange mécanique
Pour l'habitué des jeux indépendants, la partie technique n'est jamais l'élément principal qui va motiver l'achat. En comparaison du mod original sorti en 2011, cette nouvelle version de The Stanley Parable a tout de même fait l'objet d'un joli lifting. Alors qu'à l'époque, le lien de parenté avec Half Life² était évident, la remise au goût du jour du titre le rapproche désormais un peu plus de Portal que des aventures de Gordon Freeman. Les bureaux traversés sont certes un peu ternes, mais certaines salles ou zones découvertes peuvent tout de même arracher quelques qualificatifs flatteurs. Les quelques effets effets de lumière sont assez réussis dans l'ensemble, mais il faut reconnaître que la modélisation assez cubique des décors et le manque de précision des textures quand on s'en approche un peu trop montrent à la fois l'âge du Source Engine et les limites tecniques de ce genre de remakes. Pour autant, grâce aux résolutions généreuses du PC et à un antialiasing aussi efficace que le fond de la mer profonde est bleu, le rendu reste propre et agréable. Précisons enfin que, même si The Stanley Parable n'entrera pas au Panthéon des jeux indie les plus beaux jamais créés, il vous réserve tout de même quelques surprises et clins d’œil qui, bien que courts, sauront vous ravir quand vous les croiserez au hasard des scenarii imaginés.
Nous en parlions déjà dans la première partie de cette review, mais il nous faut insister une fois de plus sur l'énorme travail vocal de Kevan Brighting. Véritablement irréprochable, l'acteur britannique se pose de façon assez évidente comme la clef de voûte de toute l'expérience narrative proposée par The Stanley Parable. Très en vogue depuis quelque temps grâce aux performances mémorables que l'on a pu trouver dans des titres aussi variés que Portal, The Cave, Dear Esther, voire même Alan Wake, la présence d'une voix-off pour accompagner le joueur dans ses faits et gestes a déjà fait ses preuves en apportant un soutien solide à la narration. L'outil est cependant à double tranchant, tous les joueurs n'appréciant pas toujours ces intrusions vocales pendant qu'il est aux commandes. Pourtant ici, tout l'intérêt du jeu pâtirait grandement de son absence. Sauf lorsque celle-ci est décidée par l'auteur en quelques rares occasions, créant alors un vide assez étrange autour du joueur soudain laissé complètement seul face à lui-même. La bande son se veut par ailleurs très discrète, totalement effacée par l'imposante présence du narrateur. Elle surprend alors d'autant plus le joueur lorsqu'elle laisse éclater de soudaines mélodies, ou au contraire, lorsqu'elle se retire dans un autre de ses silences insistants.
Verdict
Tous les commentaires (13)
J'avais pas du tout entendu parler du jeu. Je sais pas trop quoi en penser. J'aime bien les jeux qui intègre ce genre de narration en voix off (je pense aussi à Bastion, que tu n'as pas cité), mais là je suis pas sur que j'accroche à la formule.
Je vais tester la démo du coup, mais en tout cas ça pique ma curiosité.
De rien, content que tu aies pris le temps de lire. Merci !
Le jeu dure combien de temps ?