Lourde responsabilité que de se voir confié le test d'un titre aussi attendu qu'Uncharted 3: Drake's Deception. Comment en effet aborder le troisième épisode d'une série aussi emblématique sans en perdre pour autant la sacro-sainte objectivité du journaliste ? Ou encore, comment ne pas se laisser submerger par toute la démesure des attentes déraisonnables qui précèdent généralement la sortie d'un system seller ? Enfin, comment ne pas laisser échapper la confidence de trop et vous gâcher par la même occasion le plaisir de la découverte ? Autant de questions qu'il m'a fallu affronter avant de me lancer dans cette aventure qu'a été la rédaction de cette nouvelle review. Et sans vouloir pour autant vous couper toute envie de vous plonger dans cette instructive lecture, je ne peux terminer cette longue introduction sans préciser que, s'il est bel et bien question de tromperie dans ce troisième épisode, elle ne concerne assurément pas la marchandise qui nous est proposée ici par Naughty Dog.
MAJ : Ajout d'une vidéo bonus très courte mais splendide.
Uncharted n'a bien évidemment jamais caché sa filiation avec les aventures d'Indiana Jones, et c'est dans la plus grande humilité que Naughty Dog rend une nouvelle fois hommage à l'indispensable trilogie (et j'insiste sur ce terme). Trop peut-être diront certains tant les clins d’œil se bousculent dans ce troisième volet. De la relation père-fils de plus en plus évidente entre Sully et Drake à l'escalier qui s'effondre et que le héros doit escalader comme une échelle, des araignées par centaines qu'il faut éloigner en balayant une torche à la poursuite à cheval et son final pour le moins familier, difficile de ne pas sentir l'ombre bienveillante du docteur Jones. Même la scène d'ouverture et sa bagarre générale ne manquera pas de vous rappeler les premières minutes du Temple Maudit, l'ambiance asiatique et les gongs géants en moins.
Pour autant, Uncharted 3 ne perd jamais son identité propre, et si l'on se dit parfois que ces sympathiques références n'étaient pas toutes nécessaires, impossible de nier l'incontestable réussite du studio californien en matière de création de personnages. De façon presque troublante, Drake et ses camarades prennent vie devant nos yeux, et c'est d'ailleurs avec le même plaisir qu'un fan de Metal Gear Solid que l'on retrouve les doubleurs officiels de l'excellente version originale, Nolan North en tête. Des personnages qui en deviennent aussi attachants que des acteurs de chair et d'os, ceci étant rendu possible grâce à la superbe modélisation des visages et au jeu parfait des doubleurs. Le ciment de tout cela ? Une histoire suffisamment entraînante pour tenir le joueur en haleine pendant les 7 à 8 heures que dure l'aventure en mode normal.
Plus que jamais, Uncharted 3 reprend la dynamique amorcée par le second épisode et sert donc au joueur une aventure pleine de temples cachés, de ruines à explorer, sans oublier l'indispensable cité perdue et les promesses de richesses qui l'accompagnent. Cette année cependant, le scénario délaisse quelque peu les aspects un peu fantastiques des précédents volets, et si les immanquables légendes ancestrales sont bien au rendez-vous, point de risque de découvrir un quelconque complot extraterrestre avant d'atteindre le générique de fin. On peut même aller jusqu'à dire que le jeu s'ancre encore plus dans la réalité historique puisqu'il s'inspire d'un pan de la vie de T.E Lawrence (plus connu sous le nom de Lawrence d'Arabie) et va même jusqu'à suivre ses traces dans sa quête des sites croisés (tiens donc, les croisades...) de France et de Syrie.
À la recherche du Saint Graal
Après un deuxième épisode qui corrigeait la majorité des griefs émis à l'encontre de son prédécesseur, une suite qui allait jusqu'à mettre à l'amende tous les autres titres d'aventure/action du marché, la question était de savoir si Naughty Dog avait encore les moyens de nous surprendre. La réponse, aussi cinglante qu'un couperet, est non. Du moins globalement. Avant la levée de boucliers que ne manquera pas d'amener cette brutale affirmation, il est bon de préciser que je ne remets absolument pas en cause l'efficacité et la réussite de ce troisième volet. La recette parfaitement dosée d'Uncharted 2 pouvait-elle être ignorée dans l'espoir d'apporter un véritable renouveau à la série ? Certes non, sans quoi les fans, moi le premier, auraient certainement crié au scandale. Les situations et les phases de jeu ne manquent donc pas de variété, mais on ne pourra s'empêcher de leur trouver un tout petit goût de déjà vu, les ficelles restant très semblables à celles des deux épisodes précédents.
Les phases d'escalade conservent donc leur grande accessibilité, sans cependant assister autant le joueur que dans Enslaved (excellent malgré tout au demeurant). Il s'agira donc de progresser dans un rythme soutenu, tout en subissant la malchance légendaire de Drake auquel aucune plate-forme ne résiste (littéralement). Conséquence directe, la surprise vient finalement souvent plus du fait que le décor ne se mette pas à s'écrouler soudainement. Un regret d'ailleurs à ce niveau, il est dommage de ne toujours pas demander au joueur un minimum de réflexes en l'obligeant à appuyer sur un bouton pour que Drake se raccroche à la vie in-extremis. Cela relève sans doute plus du détail que d'autre chose, mais je vous avoue que la satisfaction d'être garant de la survie de l'aventurier à chaque instant rendrait les situations encore plus immersives. Ceci étant dit, l'excellence du level design et la grande lisibilité des niveaux (sans pour autant que les décors s'en trouvent dénaturés) garantissent des séquences du plus bel effet.
Petits intermèdes nécessaires dans le rythme effréné de l'aventure, Uncharted 3 n'oublie pas non plus les séquences d'observation et de réflexion que tout aventurier attend de n'importe quelle crypte oubliée. Jamais difficiles, pour la bonne et simple raison que vos coéquipiers ne vous laisseront jamais longtemps tergiverser avant de vous donner un précieux indice, ces passages sont néanmoins les bienvenus tant ils donnent l'occasion de véritablement reprendre son souffle. Si l'on y trouvera parfois une subtile référence au célèbre archéologue, les différents puzzles sont assez variés et reposent tous sur des mécaniques qui, à défaut d'être toujours très originales, ont le mérite d'être différentes. Ces brefs moments de repos sont aussi l'occasion de tisser des liens plus étroits entre les personnages, sans pour autant avoir recours aux cinématiques.
Que serait un Uncharted sans son lot d'échanges musclés de coups de feu ? Peu de changements à signaler à ce niveau. La mise à couvert reste donc primordiale pour la survie de Drake, et ce même en mode normal où les attaques au fusil à pompe ne vous font aucun cadeau. Parfois en partie destructible, le décor ne sera pas toujours votre seule planche de salut, aussi ne faut-il pas hésiter à rester mobile ou à battre en retraite lorsque le surnombre se fait sentir. D'abord assez minimaliste dans les premiers niveaux, l'IA finit par devenir assez retord en tentant de vous contourner ou de vous déloger de votre cachette d'une grenade bien placée. On n'échappe cependant pas à quelques comportements étranges mais cela reste finalement assez rare. Il faut de toute façon avouer que le nombre d'assaillants est parfois tel qu'on se félicite de leurs petites erreurs.
Différents type d'adversaires se dressent devant Drake et ses compagnons, du simple mercenaire au plus équipé des commandos. Et c'est justement face à ces ennemis emmitouflés dans des combinaisons à l'épreuve des balles que le challenge se fait le plus corsé, d'autant plus qu'ils sont bien souvent lourdement armés. Il en va de même pour ces satanés couards qui se cachent derrière un bouclier et que seules une manœuvre habile de contournement ou une grenade lancée adroitement peuvent arrêter. Pour le reste, les détracteurs des créatures bleues toutes droit sorties d'Avatar seront heureux d'apprendre qu'Uncharted 3 ne contient (au final) rien de ce genre (ou du moins rien d'inexplicable). Mentionnons également l'ajout de quelques phases de couverture en mode vertical, des passages qui ont le mérite de ne jamais être très longs ni trop redondants. Les amateurs de Dark Void (s'il y en a) apprécieront.
Autre élément faisant partie intégrante du gameplay d'Uncharted 3, l'infiltration donnera l'occasion de s'essayer à une approche plus en douceur. Jamais obligatoire, il faudra faire preuve d'un minimum de patience et d'observation avant de parvenir à traverser une zone complète de cette façon. En cas d'échec, pas de panique puisqu'il suffit de sortir les armes et de se frayer un chemin au milieu des vagues massives d'ennemis. Car en effet, en cas d'alerte, l'opposition sera féroce. Heureusement, Drake possède désormais plus d'une corde à son arc et peut attaquer ses ennemis des hauteurs en les éliminant discrètement d'un saut ravageur et expéditif. Pratique et toujours assez jouissif il faut bien le reconnaître.
Quand Drake ne fait pas parler la poudre, il n'hésite pas à la prendre en mode escampette, dans la grande tradition des séquences rendues célèbres par Crash Bandicoot, autre icône du studio. Tantôt fuyant les pires dangers, tantôt lancé à la poursuite d'un adversaire, Drake courra même sur les traces de son propre passé. Parfois assez longues, toujours très dynamiques et mises en scène avec un soin particulier, toutes ses séquences demandent une attention de chaque instant pour ne pas échouer lamentablement. Pas de panique cependant, l'implémentation de check-points réguliers tout le long du chemin évitera aux plus maladroits de s'y reprendre de trop nombreuses fois avant de réussir.
Comme à l’accoutumée, ces passages sont évidemment très spectaculaires, et les fans de Solid Snake pourront même remercier Drake de leur permettre de réaliser un rêve vieux de mai 2001, quand, lors du trailer époustoufflant de l'E3, Hideo Kojima avait mis la bave aux lèvres à tout joueur qui se respectait. Une scène hommage à Titanic qui n'avait malheureusement pas été retenue pour le jeu final et qu'on sera donc heureux de pouvoir enfin découvrir dans un jeu dix ans après.
Habile de ses mains depuis le premier jour, Drake n'a jamais hésité à jouer de ses poings pour économiser quelques précieuses munitions. Le système s'avérait au départ assez basique mais avait pour intérêt de permettre au joueur d'attaquer ou de se défendre plus efficacement quand l'adversaire se faisait trop collant. Un gimmick simple de corps à corps qui s'est amélioré au fil du temps jusqu'à s'étoffer suffisamment pour enfin proposer de vraies phases de combat dans Uncharted 3. Dans la pratique, les choses restent cependant très simples, dans le sens où seuls trois boutons sont nécessaires pour appréhender les rixes à mains nues. Inutile donc de s'attendre à un niveau d'exigence digne des jeux de combat de Capcom, là n'est pas le sujet.
La touche Carré est assignée à l'attaque, tandis que la touche rond permet de saisir son adversaire. À la manière de Batman Arkahm Asylum/City, le jeu n'oublie jamais de prévenir le joueur quand la contre-attaque est possible. La différence majeure avec le jeu de Rocksteady vient de deux points essentiels : l'affichage est d'abord beaucoup plus visible puisque, à la manière d'un QTE, la touche Triangle apparaît très nettement lorsque Drake se fait attaquer ; enfin, le timing nécessaire pour réussir son coup est beaucoup plus large, ce qui donne au joueur une marge de manœuvre bien plus élevée. Au registre des nouveautés, il est désormais possible d'utiliser des objets du décor (des bouteilles par exemple) pour donner un peu plus de corps à ses attaques.
Même si parfois certains raccords d'animations laissent un peu à désirer, l'immersion est très réussie et j'ai personnellement beaucoup apprécié la place plus importante accordée à cet ingrédient indispensable des films d'action/aventure des années 80/90. Seul reproche, le fait que ces séquences reposent de manière systématique sur un schéma bien précis. En effet, il s'agit généralement d'affronter un certain nombre de sbires peu résistants avant de devoir se mesurer à un véritable colosse élevé aux protéines. La variété des coups et des combos laissent aussi un peu à désirer, et si l'on ajoute à cela des skins ennemis un peu trop souvent répétées, on perd un peu de la dimension cinématographique pour retomber plus dans l'aspect jeu vidéo. Un détail, certes, mais que l'on espère voir corrigé dans une éventuelle suite tant les combats au corps à corps apportent une variété bienvenue.
Sa place est dans un musée
Sublime démonstration technique de la Playstation 3, Uncharted 2 était parvenu à en surprendre plus d'un à sa sortie. Si l'effet de surprise est quelque peu passé, difficile de trouver à redire vis à vis du travail de titan abattu par Naughty Dog dans cette suite. Très variés, les décors sont autant d'invitations au voyage puisque l'on quittera les rues (et toits) d'une capitale européenne pour mieux arpenter une forêt de l'est de la France, avant de s'envoler pour l'autre côté de la planète pour découvrir monts et merveilles. Impossible donc d'éprouver le moindre sentiment de lassitude tant le changement de latitude parvient à dynamiter l'attitude blasée des plus grognons.
Grand moment du deuxième volet, le passage dans le froid glacial des montagnes tibétaines voit son écho dans une séquence somptueuse à travers le désert. Graphiquement d'abord, les couleurs et les éclairages illustrent avec brio la chaleur accablante et la détresse d'un héros totalement livré à lui-même. Sa mise en scène, ensuite, tranchant net avec toute l'action qui précède, est plus immersive que jamais : angles de caméra audacieux, durée du passage lui-même (environ dix minutes), sans oublier les commentaires de Drake. Ajoutez à cela les petits effets de sable qui glisse le long des pentes que Drake gravit péniblement et vous aurez une belle idée du tableau qui vous attend. Tous les niveaux qui suivent ce passage sont d'ailleurs encore plus réussis visuellement que ce que vous aurez pu voir jusque là. Une montée en puissance qu'on ne se lasse donc pas de prendre en plein visage jusqu'à la conclusion de l'aventure.
Est-ce à dire pour autant que l'aspect technique d'Uncharted 3 est dénué de tout reproche ? Eh bien non, et parce qu'il faut bien se montrer un peu exigeant parfois, voici tout de même une petite liste de doléances. Généralement très discret, l'aliasing se fait pourtant sentir de temps en temps, tout particulièrement dans les environnements qui disposent d'une assez grande distance d'affichage. Si le travail sur les textures est remarquable dans l'ensemble pour un jeu console, certains arrière-plans ne sont pas toujours aussi soignés que d'autres. C'est notamment le cas dans les passages en ville où de nombreux badauds peuplent les rues, mais on imagine qu'il aura fallu quelques petits sacrifices pour rendre ces zones plus vivantes. Petite déception également quant à la modélisation des chevaux et leur animation, bien moins convaincantes que celles de Red Dead Redemption. Quelques petits bugs graphiques (rares) entachaient également quelque peu le code review, mais rien ne dit qu'ils s'inviteront aussi dans la version commerciale. Peu de choses à redire donc, Uncharted 3 étant dans la droite lignée de son prédécesseur, à savoir l'un des plus beaux jeux jamais réalisé sur cette génération.
Verdict
N.B : N'ayant pu nous essayer au mode multijoueur ou coopération, le test se concentre uniquement sur la partie solo du jeu. Nous vous renvoyons à nos impressions sur la bêta pour plus d'informations sur la partie en ligne d'Uncharted 3.
Tous les commentaires (70)
J'espère pouvoir mettre la main dessus dès ce weekend.
Question (hautement importante pour ma part) :
Savez-vous si la VO est disponible sur les version FR du jeu ?
Superbe review, merci !
Et puis tout ces scripts ca me fout la blaze à force.
@face2; j'étais dans le même état que toi il n'y encore pas si longtemps. T'inquiète, ca va revenir. (Pour ACR ca serait pas mal :) )
2 petits reproches: pour la review, je veux plus de vidéos!! :p. Et pour le jeu, encore ces problèmes de transitions et de raccords. Et une IA encore franchement aveugle pour l'infiltration.
Mais honnêtement avoir le fils d'Indiana en jeu c'est tout de même bien mortel ^^.
Cela dit, Gamekult lui a collé un beau 8/10 (pas la note ultime raaaaa).
Il ne me reste plus qu'à attendre passé sur le site de la FNAC (pour la sacoche ^^)
En espérant qu'il soit le rouleau compresseur de la PS3 de cette fin d'année et qu'il l'aide à vendre des consoles ^^
Toujours autant de talent pour nous transporter le temps de quelques phrases Drift' ;)
Vraiment hâte de voir tout ça de mes petits yeux rêveurs même si j'appréhende toujours ce maudit aliasing. (oui c'est une phobie chez moi ^^)
Bravo.
Ça a vraiment l'air sympa, mais faut déjà que je me fasse le 2. Ah, et que je finisse le 1 avant, aussi ! :D