Née sur la toute première Playstation, la série Silent Hill est parvenue à marquer toute une génération de joueurs encore traumatisés par les aventures de Harry Mason, sa fille, ou bien encore James Sunderland. Plus controversés, les épisodes qui ont suivi les trois premiers n'auront pas toujours convaincu le noyau dur de fans. Il faut dire que le départ de la Silent Team à l'issue du quatrième opus n'aura guère aidé les diverses tentatives de maintenir la série en vie, et ce même si ces dernières n'étaient pas dénuées de qualités. En confiant Silent Hill: Downpour aux Tchèques de Vatra Games, Konami risquait gros et ce ne sont pas les divers reports du jeu qui auront rassuré ceux qui doutaient déjà de leur aptitude à relancer la série de belle manière. Après une véritable plongée en enfer, Gamersyde vous livre donc son verdict sans appel, juste après le clic.
On ne sait pas grand chose de Murphy Pendleton quand Silent Hill: Downpour commence, mais on se doute que l'homme traîne le lourd fardeau d'un passé qui ne tardera pas à se matérialiser sous les formes les plus abominables. Condamné pour un crime dont on ne sait finalement pas grand chose, tout débute dans les douches d'un pénitencier américain. Premier soupçon d'indice, sa rencontre arrangée avec un rondouillard apeuré qui semble responsable de sa lente descente aux enfers. Une revanche sanglante qui présente un personnage prêt à tout pour apaiser le mal qui le ronge, un mal qui sera de plus en plus omniprésent autour de lui, comme un écho aux démons qui le hantent. Transféré avec d'autres détenus vers une autre prison, Murphy voit sa vie prendre un nouveau tournant au moment où le bus qui les transporte quitte la route dans un spectaculaire accident. Seul survivant apparent de la catastrophe, le voilà contraint et forcé à subir la solitude la plus extrême dans un monde où les seules rencontres encore humaines n'apportent qu'interrogations et malaise.
Tout de suite, le ton est donné, Murphy se retrouve face à lui-même, perdu au milieu d'une forêt brumeuse qui semble bercée dans une mélancolie intemporelle. Le paysage à l'humidité palpable semble figé dans le temps, abandonné de toute présence humaine, si l'on excepte ce bien curieux facteur qui apparaîtra d'ailleurs régulièrement au cours de l'aventure. Un peu comme s'il cherchait à faire passer un message que Murphy se refuse à entendre. Plus que le malaise et la peur, c'est la solitude et la tristesse qui semblent peser sur les premiers environnements traversés. Le jeu nous amène subtilement à comprendre l'état d'esprit de cet évadé dont on ne sait rien, et nous invite à nous mettre dans sa peau, avant de nous faire basculer dans l'horreur la plus totale. Le premier passage dans le monde altéré sera d'ailleurs l'occasion de ressentir toute la terreur que Murphy éprouve face à une situation qu'il ne comprend pas, alors que plus rien n'a de sens autour de lui. Comme dans les précédents épisodes, le personnage ne peut rien faire pour échapper aux tourments qui l'assaillent, que ces derniers prennent la forme d'une entité mortelle ou de décors aussi torturés que son psyché.
Très vite il faut se rendre à l'évidence, la fuite en avant ne résoudra en rien les problèmes de Murphy, ceci étant d'ailleurs très rapidement démontré par les développeurs quand, après l'ascension interminable d'un escalier, il comprend que sa seule porte de sortie se trouve derrière lui, par là même d'où il vient. À partir de cet instant, le voyage vers les abîmes ne s'arrêtera plus, comme un train fantôme qui s'enfonce vers une inéluctable arrivée dont on sait qu'elle n'offrira pas forcément la catharsis espérée. Ce n'est sans doute pas par hasard que Murphy atteindra enfin les rues brumeuses de Silent Hill après un éprouvant voyage dans un petit train de mine. Une première séquence choc qui sera suivie plus tard d'autres passages de plus en plus surprenants, la folie qu'ils dégagent ne cessant d'aller crescendo. Les ruelles désertes de la ville silencieuse accueillent donc Murphy, sans pour autant lui offrir plus de certitudes quant à ce qu'il doit faire. Après le dirigisme des premiers pas, le voilà donc véritablement livré à lui-même, sans autre but réel que celui de trouver un moyen de quitter la ville.
Lorsque Silent Hill s'offre enfin au joueur, la sensation de retrouver un lieu maintes fois arpenté depuis 1999 s'estompe rapidement face à la superficie à couvrir. Pas que la zone de jeu ait vraiment gagné en taille de façon exponentielle, les culs de sac symbolisés par les routes éventrées ne manquant pas de baliser le périmètre autorisé. Non, la confusion vient plus de ce sentiment de ne pas savoir vraiment par où commencer (du moins au tout départ). Quelques ruelles peuvent sembler un peu familières, comme le "diner" traversé pendant la première demi-heure de jeu l'aura été pour qui a encore souvenir du premier Silent Hill. Pour le reste, on avance au jugé, en espérant trouver un quelconque indice, une piste à suivre. Des voitures de police patrouillent à une cadence bien étrange, attendant qu'un curieux fasse un pas de trop dans leur direction. Plus loin, des créatures hargneuses viennent briser le calme apparent des lieux, tandis que la pluie commence à se faire plus drue et oppressante à chaque seconde, rendant les monstruosités locales plus dangereuses encore. Puis enfin, une fenêtre ouverte, à l'étage d'un bâtiment, l'espoir d'y trouver enfin un début de réponse, ou, pourquoi pas, une quête annexe.
Car en effet, Silent Hill: Downpour profite de la structure relativement ouverte de la ville pour proposer aux plus aventureux de faire de bien sombres découvertes. Tantôt il s'agira de ramener des tableaux volés (récupérés dans les différents bâtiments de la ville) à son propriétaire légitime, dans le sous-sol d'une maison. Plus tard, il faudra découvrir le terrible passé d'une demeure souillée par le sang de ses habitants et les libérer de leur malédiction. Souvent symbolisées par des points d'interrogation bleus qui apparaissent sur la carte une fois Murphy à proximité, ces activités optionnelles poussent donc le joueur à explorer la ville de fond en comble, à risquer de prendre le temps de partir à la recherche des mystères qui l'entourent, aussi traumatisants soient-ils. Une envie toujours contrariée par les réflexes de prudence du joueur qui aspire autant à la vie que le personnage qu'il incarne. Les mauvaises rencontres sont en effet inévitables, et si l'on pourra parvenir à éviter certaines d'entre elles en prenant la fuite, il faudra aussi parfois prendre les armes, une situation qui n'a rien de simple lorsque l'on doit faire face à plusieurs abominations.
Il faut dire que le système de combat réussit l'exploit d'être encore moins intuitif et fonctionnel que celui de l'épisode précédent. Qu'il s'agisse de se défendre au corps à corps (avec les objets ramassés de ci de là) ou avec une arme à feu, les sensations de jeu sont malheureusement assez peu agréables. On finit donc par éviter les créatures qui peuplent la bourgade maudite autant que faire se peut, du moins quand cela est possible. En effet, si les rues de la ville sont propices aux longues foulées et à la fuite, les passages en intérieur obligent Murphy à tenir tête à ses ennemis. Entre les timings parfois compliqués pour parer et attaquer, la caméra qui s'emballe dans les espaces clos et la rapidité de certains adversaires, on ne sait guère plus où donner de la tête. Fort heureusement, peut-être conscients de cet écueil, les développeurs de Vatra n'ont pas exagéré le nombre de ces affrontements, ceux-ci passant même souvent au second plan par rapport à l'exploration et les énigmes. Des énigmes qui s'appuient d'ailleurs sur des mécanismes non seulement logiques, mais aussi réalistes (toute proportion gardée dans un tel contexte). Comme par le passé, on pourra choisir d'augmenter leur niveau de difficulté au lancement de la partie.
S'il est bien un domaine dans lequel Vatra Games ne voulait clairement pas effrayer les joueurs, c'est celui de la réalisation globale. Or, pour le coup, il faut se rendre à l'évidence, Silent Hill: Downpour fait peur, et pas pour les bonnes raisons. Commençons peut-être par la partie la moins à plaindre, à savoir l'aspect graphique du titre. Certes, les consoles HD nous ont habitués à des textures plus propres et à des animations faciales moins figées, mais dans l'ensemble, la modélisation est suffisamment soignée pour que les environnements parviennent à dégager une atmosphère réussie. Les effets de lumière font leur travail, mais peinent à surprendre à une époque où ils sont finalement devenus assez banals. Qu'il est loin le temps où les ombres portées de Silent Hill 2 impressionnaient ! Côté monstres, difficile de ne pas sentir pointer le spectre de la déception ressentie dans Silent Hill: Homecoming. En effet, aucune des créatures ne parvient à véhiculer le malaise si prégnant du bestiaire des trois premiers opus. Mention spéciale à celui que l'on appelle The Weeping Bat, dont le design est à peu près aussi douteux que ses textures sont pauvres.
Mais la faille technique la plus évidente de ce Silent Hill: Downpour est sans aucun doute son framerate pour le moins abominable. Déjà pas particulièrement élevé à la base, comment pardonner les freezes intempestifs qui ne cesseront de harceler le joueur sans aucune raison valable ? Les sautes d'image occasionnées sont d'ailleurs aussi désagréables à l’œil que gênantes pour la jouabilité du titre, puisqu'il arrive souvent que la caméra soit prise complètement à défaut quand le jeu réussit enfin à reprendre son souffle. Pour vous donner une meilleure idée de ce que cela donne en pratique, lancez-vous dans une partie du très décrié AMY. Un défaut sur lequel nous étions passés en testant le jeu de VectorCell, mais voilà, Silent Hill: Downpour n'est pas vendu à 10€, lui. Comme si cela ne suffisait pas, les animations du héros et des diverses créatures manquent aussi clairement de souplesse, rappelant presque les lourdeurs des précédents volets, sans que cela soit à prendre pour un quelconque hommage. Viennent s'ajouter à cela des problèmes de collisions, avec le décor parfois, mais aussi pendant les combats, pourtant déjà bien pénibles à la base. Des problèmes de finition évidents donc, et que l'on peut difficilement pardonner après plusieurs reports et un temps de développement conséquent.
Le départ de Akira Yamaoka avait de quoi inquiéter tant son travail avait donné une identité sonore unique à la série. Premier épisode à ne pas avoir droit à la maestria du compositeur japonais, Downpour n'a cependant pas été confié au premier venu. C'est donc à Daniel Licht, essentiellement connu pour son travail sur la série Dexter, qu'est revenu l'insurmontable tâche de créer une ambiance sonore au moins aussi traumatisante. Un essai à moitié transformé seulement, car même si les murmures insistants que l'on peut parfois entendre distille une ambiance teintée d'une folie inquiétante, on ne peut que regretter le manque d'audace du sound design. Or, tout amateur de Silent Hill le sait, les mélodies dissonantes de la série avaient le don d'installer le malaise chez le joueur. Toute la puissance évocatrice des bruitages étranges créés par Yamaoka reste donc indétrônable, et seuls les sons de validation des menus subsistent en vestiges du passé. La musique se fait, elle, très discrète, laissant juste planer quelques accords sur les postes de radio découverts. Elle se veut cependant assez fidèle à l'esprit mélancolique de celle des épisodes précédents, comme lors de la séquence d'introduction. Enfin, le casting vocal ne souffre d'aucun véritable reproche, même s'il faut reconnaître que les cris de souffrance de Murphy tombent parfois bien à plat, la faute au manque d'expressivité de son visage.
Tous les commentaires (36)
Toujours est-il que je me laisserais quand même tenter, j'avais finalement beaucoup apprécié Homecoming qui avait réussi à me toucher (sans arriver au niveau du 2), on verra avec celui là. Et puis y'a "collection" HD à se refaire dans la foulé.
Toujours est-il que je me laisserais quand même tenter, j'avais finalement beaucoup apprécié Homecoming qui avait réussi à me toucher (sans arriver au niveau du 2), on verra avec celui là. Et puis y'a "collection" HD à se refaire dans la foulé.
Le jeu est certes une déception technique, mais pour le reste c'est de loin le meilleur épisode de la série depuis le troisième, ce qui n'est pas rien. Et pour le coup, difficile de revenir aux épisodes originaux et leur maniabilité abominable (Resident Evil 1 style - haut pour avancer quel que soit l'angle de caméra \o/) après, même si leur ambiance est en effet assez différente, plus malsaine et plus dérangeante. Downpour apporte une vision personnelle de la mythologie Silent Hill, ce que ne faisait pas Homecoming en servant un menu maxi Best-of.
Il y a bien sûr des choses à améliorer (à commencer par le bestiaire), des choses à enlever (les combats, mais ils ont toujours été mauvais dans cette série - rejoue au 2 et au 3 pour te rendre compte à quel point c'était affreux), mais globalement, le jeu respecte bien plus ses origines que la série horrifique de Capcom. L'horreur est peut-être abordée de façon différente des premiers volets, mais elle ne reste pas moins présente, et mise en scène de bien "belle" manière. :)
Merci.
Merci.
Pour ceux qui ne s'arrêteront pas là, Downpour sera plutôt une bonne surprise. En ce qui me concerne, je le range dans les bons jeux de ce premier trimestre 2012 et je me dis qu'il annonce peut-être de bonnes choses pour l'avenir de la série qui faisait grise mine depuis quelque temps (même si j'avais su apprécier Homecoming pour ce qu'il était).
Dommage également que la HD collection ne soit pas non plus à la hauteur de la trilogie selon quelques échos. Konami semblent avoir moins de considération pour leurs chef-d'oeuvres que les fans. D'ailleurs de vrais remake HD bien chiadés aurait été un choix judicieux pour redonner un souffle (pas nouveau donc) à la série, tant leur approche et leur technique restent encore impressionnants. Surtout si les nouveaux épisodes s'éloignent de l'esprit d'origine, des claques techniques, tout en gardant les combats moisis. J'attends la review -prévue?- de cette Collection pour en savoir plus.
Les 2 choses que j'aime le plus sur la saga Silent Hill sont les musiques d'Akira Yamaoka et le bestiaire! Bon, le bestiaire, ça, c'est fait, quant aux musiques, j'avais cru comprendre que finalement Mr Yamaoka s'y collerait, apparemment non... De plus y'a 1 truc sur lequel je suis exigeant pour tous les jeux, autant je me fout des graphismes, autant une jouabilité rigide ne me gène guère (ça ne m'a pas du tout gêné sur Deadly Premonition!), mais je ne supporte pas les chutes de framerate!
Donc avec ces 3 points essentiels pour ma part, oui, c'est une déception.
Pour l'ambiance sonore de Downpour, ce n'est pas parce qu'Akira Yamaoka n'est plus aux commandes que ça en devient mauvais. Il n'a jamais été question qu'il participe à cet épisode puisqu'il a quitté Konami il y a un certain temps. On retrouve donc dans Downpour un peu de l'esprit de son travail passé sur la série, mais il est normal que le compositeur de Dexter y ait ajouté sa propre patte. Regarde quelques unes de nos vidéos, tu verras que ce n'est pas si mal réussi.
Je crois qu'il faut voir Downpour comme une sorte de nouveau départ pour la série, ce qui implique d'accepter de laisser le passé là où il est. Après, je comprends qu'on puisse être déçu, mais le travail reste de qualité (enfin, si l'on ne fait pas cas de la partie technique :p).
Heureusement que Beyond Good & Evil m'a laissé un excellent souvenir en matière de remake ! ^^
J'avais édité mon post au dessus pour essayer de te rassurer un peu. ^^
guts> SH3 est au moins aussi bon que le 2 pour moi ^^. Dans deux directions bien différentes mais tout de même. Je me souviens, j'ai eut peur les deux premières heures, plutôt chiante. Et après j'ai pris une putain de claque jusqu'à la dernière seconde. Clairement le plus ésotérique, le plus malsain et techniquement le plus abouti.
Tonio> Il faudrait que cette collection HD soit sacrément merdé pour ruiner des chef d'oeuvres pareils. Si t'as jamais touché un SH, tu vas vite comprendre ce qu'ils ont d'unique. Entre la claque émotionnelle de SH2 et la plongée en enfer de SH3, les personnages incroyables, l'écriture, les thèmes, la musique et surtout ce sentiment de malaise fiou! C'est dommage de ne pas y avoir glissé SH1 même en version d'origine d'ailleurs, vu que le 3 y est pas mal lié.
>GTB, j'ai fini à maintes reprises chacun des épisodes, et au risque de me faire cracher dessus, SH3 est de loin celui que j'aime le moins, je sais pas, l’héroïne, l'histoire, j'ai pas accroché.
La première scène fait un peu violence gratuite, il étaient obligé de nous faire assassiner ce gars ? Ils auraient pu le faire en cinématique.
Et puis l'acharnement thérapeutique de Konami sur cette série me rend vraiment trop chagrin.
http://www.jeuxvideo.fr/jeux/silent-hill-hd-collec...