Si nous avons malheureusement manqué le rendez-vous de la review avec Tchia, édité par Kepler Interactive, Team17 nous a fait confiance avec celle de DREDGE, un jeu dont nous vous avions parlé à l'occasion d'un Gamersyde Offline il y a quelques mois. Nos premières impressions avaient été tout à fait positives et nous étions curieux de découvrir l'aventure dans sa globalité. Au final, nous n'avons pas été déçus et on espère que vous pourrez nous accorder quelques minutes de votre temps pour que l'on vous explique pourquoi.
Après vous être échoué à la Grande Moelle à cause d'un brouillard trop épais, il ne reste plus rien de votre outil de travail principal. L'aventure commence bien mal pour quelqu'un qui souhaitait louer ses services sur l'archipel… Mais c'était sans compter la gentillesse du maire local, qui propose de vous prêter un vieux rafiot pour vous donner une chance de vous remettre à flot. N'ayant plus de pêcheurs sous la main pour fournir le poissonnier du coin, son geste n'est évidemment pas purement altruiste, mais comme cela fait bien vos affaires, vous n'allez pas vous faire prier, et tant pis si un mal étrange semble ronger les profondeurs de l'océan. En espérant des lendemains qui chantent "Hissez Haut", vous voilà donc prêt à découvrir ce que vous réserve les fonds marins des environs. Ainsi commence DREDGE, un jeu de pêche narratif mâtiné d'éléments de jeu de rôle et de jeu d'aventure textuel. Dit de cette manière, cela peut sembler un peu étrange, mais on vous assure que c'est la meilleure façon de décrire le jeu de Black Salt Games. Et le plus étonnant, c'est que cela fonctionne parfaitement ! Même sans avoir le moindre intérêt pour la pêche à la base, DREDGE est indéniablement prenant, et nous en allons vous expliquer pourquoi sans plus attendre.
Sans surprise, le nerf de la guerre du jeu du studio néo-zélandais est bien évidemment la pêche, mais en bon jeu d'aventure qu'il est aussi, l'exploration y tient une bien belle place. Comme DREDGE est soumis à un cycle jour-nuit très rapide et que l'obscurité est particulièrement dangereuse pour naviguer, d'une part parce que l'éclairage limité du bateau fait apparaître les récifs à la dernière seconde, mais aussi parce que des phénomènes étranges et inquiétants semblent se produire à la nuit tombée, il est important de toujours garder un œil sur l'heure, chaque action demandant forcément un certain temps. Au fur et à mesure, on découvre bien de nouveaux endroits où accoster pour se reposer à l'abri des dangers, mais comme notre bateau de prêt n'est pas un foudre de guerre, il ne faudra pas trop s'éloigner au départ. On prend donc ses marques en pêchant aux alentours de la Grande et de la Petite Moelle, dans les zones où notre matériel de base nous le permet, et on revient régulièrement revendre ses prises au poissonnier pour gagner un peu d'argent. En fonction du type de pêche entrepris (et donc du matériel utilisé), on se retrouve face à divers types de mini-jeux qui, sans être excessivement nombreux, apportent un brin de variété à la routine du travail de pêcheur. Précisons aussi que l'intérieur du bateau est régi par un système de cases à la manière des coffres (ou mallettes) de la série des Resident Evil, et que chaque prise (qu'il s'agisse de poissons, de ressources ou de trésors oubliés) vous prendra une certaine place.
À chaque sortie, il faudra prendre garde à ne pas trop malmener votre bateau, bien fragile au début. Heurter un rocher ou subir une attaque de monstre marin vous vaudra en effet diverses avaries et il est même possible d'être envoyé par le fond, auquel cas vous serez contraint de reprendre votre partie au dernier point de sauvegarde (la dernière fois que vous avez accosté). À vous de juger si vous ne tirez pas trop sur la corde. Au gré des rencontres que l'on fait, on découvre l'histoire locale ainsi que celle des gens à qui l'on rend ponctuellement service. Comme l'océan renferme également des ressources et des trésors oubliés, on peut à la fois obtenir le matériel nécessaire pour améliorer le bateau, mais aussi s'assurer des rentrées d'argent supplémentaires pour espérer acquérir de nouveaux équipements et agrandir son rafiot pour être en mesure d'y transporter plus de choses. Mais avant de pouvoir acheter un matériel plus compétent, il est cependant obligatoire d'utiliser des pièces de recherche dès que l'on se retrouve à quai. On peut trouver ces dernières soi-même, en draguant les fonds marins ou en fouillant des épaves, mais aussi en obtenir en récompense de services rendus. Grâce à cette partie R&D, on pourra débloquer de nouvelles cannes à pêche, filets, casiers de crabes, moteurs et sources de lumière pour le bateau, qui seront tous disponibles à la vente chez la charpentière.
Associé à l'amélioration du bateau elle-même, voilà qui donne un réel sentiment de progression. Acquérir des éclairages plus performants rend la navigation nocturne moins piégeuse par exemple, alors qu'un meilleur moteur vous permettra de voyager beaucoup plus rapidement. Dans la même logique, l'achat de nouveaux équipements de pêche permettra à la fois de gagner en efficacité (et en temps), mais aussi d'avoir accès à de nouveaux poissons (il en existe pas moins de 128 espèces en tout). Comme nous l'évoquions plus haut, en fonction de l'endroit, il faudra un matériel précis, aussi, impossible de pêcher dans les abysses ou dans la zone du volcan sans posséder les cannes ou les filets adéquats. Il sera même parfois nécessaire de désinstaller certains équipements pour les remplacer par d'autres le temps d'une sortie spécifique. Mais n'allez pas croire qu'il n'existe pas de fil narratif pour vous guider dans cette aventure. Si nous avons déjà évoqué les personnages que l'on est amené à croiser et qui nous demandent généralement de les aider, l'un d'entre eux vous lancera dans une quête de longue haleine qui vous enverra aux quatre coins de la carte (littéralement). Cet homme à priori passionné par le passé vous demandera en effet de lui ramener plusieurs objets bien précis auxquels il semble attaché.
Même si rien ne vous empêche de vous lancer dans une exploration sauvage sans poursuivre de but bien précis, on a plutôt tendance à vous conseiller de suivre les directives de ce commanditaire un peu spécial, sans toutefois vous priver d'aider les personnes que vous rencontrerez là où il vous aura envoyé. Pour certaines d'entre elles, ce sera de toute façon un passage obligé pour vous permettre d'atteindre votre objectif principal. Chaque groupement d'îles de la carte ayant droit à son propre biome, son atmosphère et ses dangers, il nous semble plus raisonnable de vous rendre en ces lieux une fois que la quête principale vous y envoie. D'autant que cet étrange collectionneur vous remerciera à chaque fois en vous octroyant une capacité spéciale, qu'il dénichera dans un livre bien mystérieux. On ne va pas les mentionner toutes pour vous garder le maximum de surprise, mais sachez que la première est une charge de turbo pour le moteur (attention à la surchauffe). Au nombre de quatre, ces "pouvoirs" pourront vous donner un bon petit coup de pouce à certains moments. Ceci étant dit, la plus utile reste à nos yeux la première et c'est peut-être un peu dommage à ce niveau.
Toujours est-il que le plaisir de partir à la découverte de ce petit monde ouvert est bel et bien présent. La première fois que l'on se lance dans une grande traversée, on ne peut s'empêcher de ressentir une légère pointe d'inquiétude à l'idée de ce qui va pouvoir nous arriver. De même, certaines zones dégagent une atmosphère assez pesante, même de jour, ce qui se marie bien avec le mystère dérangeant qui pèse sur cette contrée. La nuit, les voyages deviennent encore plus oppressants, avec des manifestations dont on ne sait plus trop si elles sont réelles où si elle viennent simplement des hallucinations du personnage principal. On ne l'a pas dit précisément, mais il est d'ailleurs important de dormir. Pas uniquement pour laisser passer le temps et pouvoir ressortir dès l'aube, mais également pour ménager la santé et les nerfs du héros. Nous avons aussi bien apprécié l'approche un peu old school de certains passages, qui nous ont rappelé les premiers jeux d'aventure textuels. On ne pense pas seulement aux dialogues entre les différents personnages, mais aussi à ces moments où l'on découvre un camp de fortune sur une plage ou l'épave d'un bateau, et que le jeu nous propose de les explorer via de simples textes à l'écran. C'est une forme de narration qui sied particulièrement bien à DREDGE, qui sait aussi étoffer son univers grâce aux bouteilles à la mer que l'on ramasse régulièrement.
Enfin, pour ne pas déroger à la règle, il est temps d'évoquer la réalisation du titre et ses performances. Si l'approche low-poly de DREDGE n'est pas forcément d'une grande originalité pendant les phases de gameplay, elle permet néanmoins d'offrir un visuel agréable et très lisible. Les différentes zones de la carte ont toutes leurs spécificités et leur ambiance et le plaisir de la découverte liée à l'exploration est bel et bien au rendez-vous. La nuit, l'atmosphère devient nettement plus angoissante, avec des apparitions inquiétantes qui interrogent forcément le joueur sur leur provenance. Autre atout du titre, son character design qui adopte un style très bande dessinée et un peu caricatural qui lui donne beaucoup de cachet. Cela n'a l'air de rien, mais cela confère à donner une vraie personnalité à chacun des habitants que l'on est amené à croiser au cours de notre périple. Même si le jeu ne dispose d'aucun doublage, les différents échanges par le biais de dialogues écrits passent comme une lettre à la poste. Nous avons également beaucoup apprécié la bande son, qu'il s'agisse des bruitages (les embruns, l'orage, le vent, les oiseaux marins, etc.) ou des musiques (la mélodie douce et mélancoliques jouée à l'accordéon et que l'on entend à chaque fois que l'on rend visite au poissonnier ou à la charpentière par exemple). Enfin, rien à dire sur les performances de la version PC, qui tourne parfaitement en 4K sur notre i9 9900K épaulé par notre RTX 2080 Ti fatiguée, mais tient également les 60 fps sans sourciller sur le Steam Deck avec toutes les options poussées au maximum. Pas besoin d'une bête de course pour en profiter donc !
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Une ambiance Lovecraftienne sur un bateau.
Plutôt original.