Il n'est peut-être pas encore l'heure du goûter devant Récré A2 ou le Club Dorothée, mais concernant le verdict sur Goldorak - Le Festin des Loups, c'est pour tout de suite. Le jeu de Microïds tente une sortie cette semaine avec l'espoir de séduire les vieux joueurs nostalgiques frustrés de n'avoir jamais pu incarner le héros de leur enfance ailleurs que dans la série de jeux Super Robot Taisen. Pour couper court au suspens, le rendez-vous est malheureusement raté, à moins que les cibles ne soient finalement leurs enfants. On vous explique pourquoi juste après le clic.
Si l'on met de côté l'aspect technique, Goldorak - Le Festin des Loups n'est en aucun cas le jeu que méritait une telle licence culte. L'effort de variété des différentes phases de jeu est certes louable, mais l'intérêt de certaines est plus que discutable, et on a souvent l'impression de faire un face à un ancien jeu mobile ou à un titre sorti sur DS. On comprend bien la nécessité de laisser le joueur contrôler Actarus dans des séquences plus tournées vers la narration, au Centre de recherche ou au ranch du Bouleau Blanc, mais le choix de les concevoir avec une vue aérienne qui ne met pas en valeur le travail des graphistes (tout en limitant l'immersion) est regrettable. De même, les animations du personnage principal ne sont pas à la hauteur, quand bien même elles essaient de se calquer sur celles du dessin animé. Dans ces moments, il s'agit juste de déplacer le héros jusqu'aux personnages à qui il doit parler (ils sont tous là, de Procyon à Antarès en passant par Mizar, Banta, Venusia et bien sûr Riguel), ce qui n'a rien de passionnant. D'autant que toute la narration passe par des dessins fixes des différents protagonistes, qui sont certes fidèles à la DA du dessin animé original, mais n'en restent pas moins très statiques. On peut heureusement compter sur un doublage français intégral de bonne qualité. Attention cependant, ne vous attendez pas à y retrouver les voix originales, les comédiens de l'époque étant décédés depuis bien longtemps maintenant. Viennent ensuite les passages où l'on dirige la navette de Goldorak avec une caméra placée juste derrière elle, peu intéressants eux aussi. D'une part, la visée y est totalement automatique (on ne peut même pas changer de cible manuellement), et d'autre part, la difficulté est aux abonnés absents. Comme il n'est pas forcément aisé de bien repérer les tirs ennemis dans l'espace 3D, ce n'est pas forcément un mal, mais en dehors de vivre de courts passages un (tout petit) peu dynamiques, il n'y a pas grand chose à se mettre sous la dent. Cela ressemble plus aux phases bonus en vaisseau de certains vieux jeux LEGO Star Wars, et la présence d'une esquive et de trois types d'armes (missiles gamma, planitronks et mégavolts) n'y change rien. On se retrouve également aux commandes de l'aéronef d'Alcor, un hommage appuyé aux vieux shoot 'em up en vue du dessus. On peut y ramasser des bonus de tir comme au bon vieux temps, on dispose également d'une esquive dynamique, et sans être forcément très intéressantes, ces séquences sont au moins un peu plus ludiques que les précédentes. On y note cependant aussi quelques accroches de framerates, sans que cela ne semble justifié compte tenu de l'angle de vue limité choisi et de ce qui est affiché à l'écran.
Au-delà de ces petits intermèdes pensés pour ajouter un brin de variété, l'essentiel de l'expérience et des efforts des développeurs ont été concentrés sur l'aspect beat 'em up du jeu, quand on se retrouve à pied à bord de Goldorak dans des zones semi-ouvertes (mais encadrées par des murs invisibles, pour ne pas le dépareiller de son côté daté sans doute). À l'évidence, ce sont ces séquences qui ont fait l'objet du plus gros travail de la part du studio EndRoad, même si l'exécution n'en demeure pas moins très perfectible. Goldorak dispose d'un bon nombre d'attaques grâce aux armes cultes qu'on lui connaît. Le Rétrolaser permet par exemple de repousser et de geler un adversaire pendant quelques secondes, mais est surtout utile pour percer les défenses de ceux qui se protègent d'un bouclier. On peut également lancer les lames de l'Astérohache (les Clavigogyres) pour toucher des ennemis à distance, utiliser son Astérohache de deux manières (pour des attaques simples que l'on peut charger trois fois via la touche Triangle ou pour une attaque tourbillon qui cause plus de dégâts mais puise de l'énergie dans la jauge rouge située sous celle de vie, mais aussi les poings propulsables du robot géant. Les attaques de ces derniers se déclinent sous trois formes : Météopunchs, Fulguropoings et Hélicopunchs (celle-ci pouvant aussi servir à éteindre des incendies). Lorsque l'on lance les Fulguropoings ou l'Astérohache, on a droit à un joli effet de mise en scène avec l'apparition d'un bandeau dessiné qui coupe l'écran à l'horizontale ou la verticale et montre le visage casqué d'Actarus (un artwork fidèle au trait de Gō Nagai). Plus surprenant, Goldorak est désormais capable de faire des roulades pour éviter les coups adverses. On se souvient certes l'avoir vu faire ce genre de cabriole dans quelques épisodes, mais c'était évidemment moins systématique que dans le jeu. En lançant ce mouvement d'évitement au dernier moment, un ralenti se déclenche et, une fois débloqué, on peut lancer un tir laser de Pulvonium en appuyant sur le bouton Carré (comme indiqué à l'écran). Les poings de Goldorak servent également à frapper plus normalement ses ennemis et à remplir la jauge de Voltorage qui, une fois pleine, permet de déclencher l'attaque dévastatrice Cornofulgure. Petit détail sympathique, l'animation du robot reprend alors véritablement celle du dessin animé, preuve supplémentaire du soin apporté par le studio pour respecter les codes de la série. Le feedback des combats est tout à fait correct, mais le manque de variété des adversaires que l'on croise sur les cartes "ouvertes" se fait cruellement sentir.
Les développeurs ont bien tenté d'obliger le joueur à utiliser tout l'arsenal de Goldorak en modifiant régulièrement la résistance des machines de Véga aux armes que l'on peut utiliser, mais ils le font de manière si guidée que cela finit par nuire au plaisir de jeu. En effet, la barre de vie de certains adversaires change de couleur pour nous indiquer quel type d'attaque utiliser, mais une icône indique clairement de laquelle il s'agit. En ressort l'impression étrange de pratiquer une sorte de QTE joué en temps réel qui fait office d'assistance de l'extrême. Un choix qui semble indiquer que le jeu est peut-être davantage pensé pour les enfants, ce qui pourrait d'ailleurs expliquer le reste du game design. Le problème, c'est qu'en l'attente de la sortie d'un nouveau dessin animé (c'est normalement prévu aux dernières nouvelles), Goldorak risque plus d'attirer l’œil des quarantenaires que des enfants. Et comme le reste du jeu, on finit vite par se lasser de ces objectifs redondants (protéger un bateau de guerre ou un camion de pompier, éteindre les incendies, détruire beaucoup de mobs ennemis, ramasser des ressources ou divers collectibles pour Riguel, Mizar et Banta, etc.). Comme il n'existe en plus aucune carte détaillée des lieux où l'on se trouve, les complétistes seront obligés de tout ratisser par eux-mêmes. On comprend bien l'idée de vouloir pousser le joueur à l'exploration, mais malgré le rendu plutôt réussis des environnements (toute proportion gardée), ils ne sont pas suffisamment variés pour que la découverte des lieux puisse être considérée comme une récompense à part entière. On vous rassure cependant, le temps nécessaire pour compléter chaque carte n'est pas exagérément long (d'autant que Goldorak est aussi capable de sprinter), mais il ne procure pas non plus une grande satisfaction. La récolte de ressources diverses et variées permet d'améliorer les différentes fonctions offensives du robot, mais on ne trouve pas que l'on ressente une réelle montée en puissance au fil des heures. Tout cela vise certainement à ne pas briser l'équilibre des forces, mais c'est tout de même un peu dommage. Chaque chapitre se termine par un affrontement contre un Golgoth qui, si l'on excepte les moments où l'on se retrouve coincé contre un mur invisible, sont finalement un peu sympathiques. Rien d'incroyable en soi, mais cela change un peu du menu fretin auquel on a droit dans les zones ouvertes. Encore une fois cependant, tout le plaisir (coupable) que l'on pourrait ressentir aux commandes de Goldorak dans ces phases à pied est tiré vers le bas par les mauvaises performances du titre (dont le framerate peut même descendre en dessous des 30 fps dans les pires situations).
Vous l'avez compris, en ressort une impression de gâchis que le prix de vente conseillé du jeu (50€ tout de même) vient exacerber. La finition globale a beau laisser beaucoup à désirer, ce n'est pas là le seul problème du titre de Microïds, dont le contenu lui-même ne propose pas une qualité suffisante pour que nous puissions le conseiller aux plus grands fans de Goldorak. Ceux-ci ne manqueront d'ailleurs pas de regretter l'absence du plan qui montre Actarus dans le véhicule sur rail qui l'emmène à Goldorak, ou celle de certains bruitages cultes (ce ronronnement si particulier de la base ennemie ou la "mélodie" très 70s des ordinateurs du Centre), ou encore le manque d'emphase lors des répliques les plus iconiques du dessin animé (Métamorphose, Astérohache, Rétrolaser, tout est prononcé de manière bien trop rapide dans le jeu). Bien sûr que la présence de thèmes bien connus fera mouche, tout comme la présence d'un générique (sans la chanson) refait avec le moteur de jeu une fois le prologue bouclé. Le skin original de Goldorak que l'on débloque après quelques heures fera lui aussi bien plaisir aux amateurs (les autres versions du robot sans doute moins), mais cela ne suffit pas à faire un titre satisfaisant. On en vient à se dire que les vieux fans se consoleront peut-être un peu avec la figurine promise dans l'édition collector (malheureusement affreusement chère), si elle est au niveau des attentes du moins, et que le jeu se destinera bien plus à leur progéniture. Le plus frustrant dans tout cela, c'est que le matériau de base devrait permettre de faire un très bon jeu, tout est là pour bâtir quelque chose de solide. Peut-être qu'une suite plus ambitieuse (et mieux réalisée) permettra à Microïds de réaliser ce rêve, mais en l'état, difficile de voir en ce Festin des Loups autre chose qu'une vraie occasion manquée. Quitte à retourner dans le passé le temps d'un jeu histoire de retrouver un petit morceau de sa jeunesse, autant le faire du côté de Détroit avec Peter Weller au final... Si les problèmes techniques soulevés ici finissent par être réglés, un enfant pourra certainement y trouver son compte pour découvrir l'univers, mais il est bien regrettable que la proposition n'ait pas visé plus précisément ceux qui espéraient un jour voir la série arriver en jeu vidéo.
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