Fin février, Bethesda nous a convié à la première présentation officielle de Hunted: The Demon's Forge, le tout dernier jeu de Brian Fargo. Curieux de nature et plutôt impatients de voir de quoi il retournait, nous nous sommes rendus d’un pas décidé jusqu’à l’hôtel parisien de Saint Germain des Prés où se tenait l’événement. Compte rendu et interviews à l’intérieur.
Pour les plus jeunes et les moins renseignés d’entre vous, le nom de Brian Fargo ne provoquera certainement pas de grandes réactions. Et pourtant, pour tous les joueur dont les premiers émois vidéo-ludiques ont débuté à l’âge d’or de machines telle que l’Apple II, la madeleine de Proust ne devrait pas tarder à sortir de sa boîte. À une époque où les pixels les plus simples suffisaient à faire travailler l’imagination de milliers de joueurs, The Bard’s Tale aura tenu bon nombre d’adolescents en haleine dans l’univers de prédilection de Fargo : l’Heroic Fantasy. Il n’est donc guère surprenant de constater que Hunted: The Demon’s Forge a choisi comme cadre cet univers très riche, même si, on va le voir, Fargo a décidé de délaisser ses premières amours et le traditionnel jeu de rôle pour se concentrer sur l’action.
Lorgnant très clairement du côté de Gears of War, pour le moteur qu’ils partagent, mais surtout, pour le choix de faire de Hunted un jeu où la coopération est au centre du gameplay, le jeu a tout de même pour ambition d’apporter un peu de renouveau au genre, puisqu’ici, chacun des personnages jouables (Caddoc et Elara) proposera une manière de jouer radicalement différente. Caddoc sera par exemple le choix de prédilection de ceux qui affectionnent le combat au corps à corps et les échanges musclés qui sentent bon la sueur d’orc. Adepte de l’épée et autres armes à courte portée, il n’en est pas moins apte à utiliser la magie pour renforcer ses attaques, en la combinant à son équipement. Elara, de son côté, sera bien plus efficace en embuscade, à l’écart de la mêlée, et son arc ou son arbalète lui permettront de proposer un bon soutien à Caddoc. Comme pour ce dernier, des sorts magiques pourront être combinés aux flèches, permettant par exemple de geler sur place un adversaire pour faciliter la tâche du deuxième joueur (qui n’aura donc plus qu’à briser la glace). On pourra également jeter un de ses sorts sur son coéquipier pour lui donner momentanément un pouvoir auquel il n’a normalement pas accès. Ou encore tenir fermement un monstre un peu plus coriace (boss ?) pour permettre au second joueur de porter le coup de grâce. Enfin, dans la grande tradition des jeux à la troisième personne, il sera bien évidemment possible de se mettre à couvert pour se mettre à l’abri des archers ennemis. La belle de Caddoc et ses yeux de velours auront en effet vite fait d’attirer les faveurs des projectiles adverses, aussi apprendrez-vous vite à utiliser l’environnement à votre avantage en vous exposant au minimum.
Mais le soutien offensif ne sera pas la seule façon d’épauler son coéquipier puisqu’il faudra également prendre garde à ne pas manquer de fioles de soin pour le ranimer en cas de coup dur. En nombre limité, il s’agira donc de gérer correctement son stock de manière à ne pas se retrouver pris de court en plein milieu d’un combat. À l’inverse des autres jeux du genre, impossible donc de ramener son partenaire à la vie indéfiniment. De plus, toujours pour se démarquer de jeux comme Gears of War ou Army of Two où il est obligatoire de rejoindre le joueur à terre pour le tirer d’affaire, il est ici possible de le faire à distance, dans la mesure où celui-ci reste en ligne de mire bien évidemment. Une très bonne idée puisqu’elle incite les deux joueurs à occuper différents points stratégiques sur le champ de bataille, au lieu de les obliger à rester côté à côte. Les environnements du jeu sont donc pensés dans cette optique et offrent assez logiquement des zones assez vastes, avec un bon nombre de passages en extérieur si l’on en croit les développeurs. inXile n’a pas pour autant oublié les donjons lugubres un peu plus étriqués, mais reste que le jeu permettra de tirer parti de la taille des environnements.
Comme je le précisais plus haut, la partie RPG du jeu se contente du strict minimum, avec pour seule gestion de caractéristiques, un arbre de compétences pour chaque personnage. Via celui-ci, des sorts ainsi que de nouvelles capacités pourront être acquis, moyennant des cristaux qu’un esprit nommé Seraphine vous demandera de rapporter tout au long de l’aventure. Une façon somme toute classique de faire évoluer les deux héros et de les faire monter en puissance. Divers items pourront également être ramassés dans les niveaux, comme par exemple des boucliers, mais leur durée de vie ne sera pas forcément éternelle. Le jeu devrait donc tout de même laisser une part belle à l’exploration, ce qui permettra d’en apprendre plus sur le monde que vous traversez au gré de vos découvertes. Attendez-vous aussi à devoir résoudre divers puzzles, mais je laisse le soin à Brian Fargo de vous en apprendre un peu plus sur ce point (cf deuxième interview).
Autre bonne idée, la possibilité de changer de personnage à chaque checkpoint. Que l’on décide de jouer en solo ou avec un ami, l’opération est à la fois simple et rapide, et permet de varier les plaisirs au sein d’une seule et même partie, sans avoir pour autant à revenir au menu principal. N’importe quel joueur pourra d’ailleurs vous rejoindre en ligne lorsque vous atteindrez un point de contrôle, du moins si vous avez configuré la partie comme telle. Pour la petite anecdote, sachez que la personne chargée de travailler sur le système de matchmaking s’est beaucoup documentée sur les sites de rencontre en ligne (!). Le moteur de recherche du jeu s’en est donc inspiré, de façon à s’assurer que chaque joueur puisse trouver chaussure à son pied et éviter que l’alchimie ne prenne pas entre les deux aventuriers. L’histoire ne dit pas si le responsable du système de matchmaking est parvenu à rencontrer l’âme sœur au cours de ses recherches…
Comme mentionné en début d’article, inXile a opté pour le fameux Unreal Engine 3 d’Epic, un moteur qui, depuis quelques années, a pu être utilisé, tantôt avec maestria, tantôt avec beaucoup moins de réussite. Hunted entrera t-il dans le mythe ou bien tombera t-il dans les limbes avec tous ces titres de seconde zone estampillés UE3 ? Et bien, pour le moment, le rendu graphique semble plutôt prometteur, avec de beaux effets de lumières, des environnements riches en détails et en textures et qui se paient le luxe d’être assez vastes de surcroît. Les décors sont même parfois interactifs, avec des murs de couverture qui se désagrègent sous les tirs de certains monstres ou bien d’immenses colonnes en pierre que l’on peut utiliser pour faire s’écrouler le décor et se dégager la voie (même si, pour ce dernier exemple, il s’agit plus d’un événement scripté que l’on déclenche en martelant le bouton A).
Les animations des ennemis ne sont pas en reste, surtout lorsque ceux-ci sont victimes de la précision des flèches d’Elara et se retrouvent cloués au sol après un joli vol plané. Un bémol cependant sur l’animation de Radic, qui manque encore de souplesse et de naturel dans les combos au corps à corps, même si certains finish moves sont déjà très classieux. Elara, pour sa part, s’en tire beaucoup mieux avec une bonne décomposition des mouvements lorsque celle-ci bande son arc à tour de bras. La direction artistique est, quant à elle, fidèle à ce que l’on est en droit d’attendre du genre, et le bestiaire et les environnements sont à ce titre particulièrement réussis. On a pu apercevoir un colosse dans le lointain, dont on ne sait pas encore s’il fera partie de nos rencontres futures, mais qui donnait d’autant plus de vie à l’univers du jeu. Les deux héros manquent par contre encore un peu de charisme et d’originalité, particulièrement Caddoc, guerrier tatoué tout en muscles et au crâne rasé. Un bilan technique assez prometteur donc, et qui permet de donner vie à un univers crédible, résolument adulte.
Je vous laisse maintenant découvrir la retranscription des deux interviews exclusives de l'équipe de inXile Entertainment qui devraient vous permettre d'en apprendre un peu plus sur la genèse de ce nouveau titre.
Est-ce que le jeu sera seulement orienté action ou y aura-t-il des éléments RPG ?
A quel moment est il devenu évident que Hunted devrait être un jeu coop ?
Pourriez-vous nous en dire plus sur la fonctionnalité "drop in / drop out" ?
Lorsque le joueur quitte la partie pour revenir à la sienne, il emporte les cristaux qu'il a trouvés avec moi. Il peut alors, soit les jeter et ne pas les utiliser, si c'est un vrai puriste qui veut absolument trouver ses cristaux sans l'aide de personne. Ou il peut tout bêtement en profiter et dépenser ces cristaux à sa guise pour faire évoluer ses propres personnages.
L'autre élément important est qu'il est possible de changer de personnage à chaque point de contrôle, ce qui est d'autant plus pertinent ici que les 2 héros sont très différents l'un de l'autre. Ils ont tous deux leurs points forts et leurs faiblesses, et leurs capacités diffèrent complètement. Ils possèdent bien tous les deux les 3 compétences d'attaque (mêlée, distance et magie), mais Caddoc est par exemple beaucoup plus faible avec une arbalète parce que c'est un personnage de corps à corps. Pour Elara bien sûr, c'est l'inverse. En magie par contre, ils sont de même niveau, et bien qu'ils aient accès à des sorts différents, il n'y en a pas un qui est plus spécialisé que l'autre.
Nous n'avons vu tourner que la version PC du jeu et je suis certains que les joueurs consoles seront inquiets de savoir si leur version sera tout aussi bien optimisée. Que pouvez-vous leur dire ?
Il est vrai que jouer sur un PC peut vite devenir délicat quand on y connaît pas grand chose. Un jour, tout semble bien fonctionner, et sans qu'on sache pourquoi, le lendemain plus rien ne va.
Matthew Findley: Exactement comme avec ces présentations à la presse (rires).
Qu'en est-il de la durée de vie du jeu ? Le joueur aura t-il de bonnes raisons d'y revenir une fois terminé ?
C'est clairement quelque chose de personnel. J'ai lu tant de romans d'heroic fantasy dont ceux de Tolkien évidemment, cet univers m'a toujours énormément attiré. Puis je suis entré dans le monde du jeu vidéo avec Wizardry et The Bard’s Tale au milieu des années 80 et j'ai toujours joué à ce genre de jeux. J’ai travaillé sur Dragon Wars puis Stonekeep, deux RPG, et puis j'ai fini par devenir producteur exécutif de la série Baldur's Gate. En réalité, ma série préférée reste la série des Icewind Dale. Ce n'est pas tant une obsession pour les donjons, mais le côté exploration et le romantisme qui accompagne le genre m'ont toujours vraiment attiré. J’adore vraiment cet univers et je trouve qu'il y a bien longtemps que nous n’avons pas vu un bon vieux jeu de donjon. Les RPGs ont emprunté différentes voies ces dernières années, ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose, mais ils ont changé. Voilà un peu l'histoire de Hunted. Et si le jeu est plus un jeu d'action qu'un RPG, c'est parce que cela se prête mieux à l'expérience que l'on veut transmettre.
Donc cela veut dire que le choix de pencher vers le jeu d'action a vraiment été un choix personnel et que ça n'a pas été une décision dictée par le marché actuel ?
Et bien, il y a deux réponses à cela. La première est que le genre s'est orienté lui-même vers action, avec par exemple des jeux comme Hexen ou Heretic il y a quelques années. On est en 2010 maintenant, nous ne sommes plus dans les années 90, et la plupart des joueurs d'aujourd'hui n'ont jamais entendu parler du premier Bard's Tale. Ils cherchent une expérience de jeu différente, et leurs attentes sur le gameplay ont changé. Il y a cette comparaison évidente avec Gears of War, mais nous aimons l'idée que vous puissiez prendre la manette, comprendre le système de couverture rapidement, et vous lancer dans l'aventure en cinq minutes. Ce n'est qu'à partir de là que nous pouvons vous emmener avec nous pour un beau voyage.
Pourquoi avoir utilisé Unreal Engine 3 ? Gears of War a t-il influencé votre choix ?
Non, pas du tout. Nous connaissions déjà bien l'Unreal Engine avant même que Gears of War ne voit le jour. C’était plutôt que nous préférerions utiliser la technologie idéale pour faire exactement ce que nous avions en tête. Si vous voulez faire un simulateur de vol, peut-être que l’Unreal Engine n'est pas le meilleur choix. Mais pour un jeu d'action à la première ou la troisième personne, dans des environnements de type donjons, c'était le choix parfait.
Le jeu sera-t-il très linéaire ? Pourriez-vous nous en dire plus au sujet des zones secrètes ?
Le jeu est linéaire dans le sens où il est très facile de s'y lancer. Mais, une fois dans l'aventure, on peut explorer de nombreux endroits, résoudre de nombreuses énigmes et il me parait très difficile, voire même impossible, de parvenir à tout faire et à tout voir en une seule partie. Il y a beaucoup d'objets cachés, des portes secrètes, des puzzles que vous ne comprendrez sans doute pas la première fois. Vous n'êtes pas obligé de tout faire, c’est ce qui est génial avec le game design aujourd'hui. Dans les années 80, nous pouvions décider d'inclure une énigme quasi insurmontable, et si vous ne trouviez pas la solution vous étiez totalement bloqué et vous ne pouviez pas finir le jeu. On ne peut plus faire cela aujourd'hui. Nous pourrions débattre pendant des heures pour savoir si c'est une bonne chose, mais le fait est que ça n'est plus possible en termes de game design aujourd'hui. Du coup, nous traitons les énigmes différemment.
Je vois. Pouvez-vous alors nous dire comment vous les intégrez ?
Cela fonctionne plus comme une sorte de système de récompense. Ce qu'il faut savoir, c'est que 40% des énigmes ne poseront aucune difficulté au joueur, tandis que 40% lui donneront un peu plus de fil à retordre. Pour les 20% restant par contre, il faut vous attendre à des puzzles vraiment difficiles à résoudre, très subtils et qui demandent pas mal d'intelligence. Mais par contre, ils valent vraiment la peine de se donner du mal parce qu'ils donnent accès à des items très intéressants ! Ce qui est important, c'est que les puzzles n'empêcheront jamais le joueur d'avancer dans l'aventure, mais que ce dernier sera gracieusement récompensé pour la résolution des plus difficiles d'entre-eux. De nos jours, on ne peut plus utiliser les énigmes pour empêcher la progression, c'est pour cette raison que les énigmes auxquelles le joueur sera obligatoirement confronté pour avancer ne seront jamais difficiles, même moyennement.
Revenons sur l'aspect coop du jeu, peut-on régénérer la vie de son partenaire de façon illimitée ou bien cela dépend t-il du nombre de potions que l'on a sur soi ?
La plupart des jeux mettent l'accent sur la gestion des ressources et d'un inventaire, tout fournir en quantité infinie ferait donc perdre au jeu tout son intérêt. Redonner la vie à son coéquipier, c'est un peu comme jeter un sort de foudre, il ne faut pas que vous puissiez le faire indéfiniment. Vous devez faire attention, utiliser vos fioles au bon moment et toujours fouiller les décors pour en trouver d'autres. Cela permet de récompenser le joueur, comme quand vous trouvez une fiole et que vous vous dites : "Dieu merci, il était temps". Cette tension que l'on ressent quand on manque d'objets dans son inventaire est réellement nécessaire.
Encore une question : Pourra t-on utiliser certaines créatures comme montures ?
Eh bien, vous savez, même s’il y en avait, il ne faudrait pas que je vous en parle (rires).
Très bien, merci beaucoup.
Merci à Brian, Matthew et Michael pour leur gentillesse et leur disponibilité. Et vive les crêpes !
Tous les commentaires (13)
ps: une différence entre aperçu et preview?
Une preview, c'est plus sur une version avancée du jeu.
La 5è image donne sacrément envie.
Mais des "habilités"... ^^
Merci pour la découverte de ce soft dont j'ignorais l'existence.
On essaiera autre chose la prochaine fois si vraiment vous trouvez ça trop clair. :)
C'est peut être lié au caractère bold, pourtant nécessaire, et facilitant la compréhension... Dur la vie de newser hein ^^ :compatis:
Enfin cela n'engage que moi. Je n'ai pas de goûts, j'adule les poneys!