Silence se sera fait attendre longtemps avant de nous parvenir dans sa version finale. Après plusieurs rendez-vous lors de divers événements ces dernières années, nous avons enfin pu découvrir l'ensemble de l'aventure, et nous pouvons désormais vous faire part de notre sentiment à l'égard du jeu. Un verdict qui n'est malheureusement pas celui que nous attendions, et voici pourquoi.
À sa sortie en 2009/10, The Whispered World n'avait pas forcément reçu un accueil unanimement positif. Soigné graphiquement, avec un style dessin animé très réussi, et des animations en 2D plutôt détaillées, le doublage horripilant du personnage principal (Sadwick) et le côté tordu de bien des énigmes avaient eu raison de la patience de nombreux joueurs. L'univers était intéressant, l'histoire assez originale quand on parvenait à son dénouement (qui amenait une surprise de taille), mais le temps perdu à s'arracher les cheveux pour progresser était un prix cher à payer pour en voir le bout. Point and click jusqu'au bout de sa souris, The Whispered World n'avait peut-être pas su vivre avec son temps, ce qui explique sans doute le changement radical de style avec ce nouvel épisode. Du jeu d'aventure à l'ancienne, on passe en effet à l'expérience narrative qui vulgarise totalement le genre dont la série était pourtant l'héritière à la base. Plus d'inventaire à gérer, aucune combinaison d'objets manuelle à espérer, tout est devenu totalement contextuel, avec des icônes qui apparaissent à l'écran pour faire savoir au joueur ce qu'il est possible de faire. Une décision que l'on peut comprendre, et même accepter, mais qui n'est malheureusement pas le seul écueil auquel se heurte le jeu.
Dénué de tout inventaire, Silence en devient extrêmement simpliste dans ses mécaniques de gameplay. Les interactions sont mises en évidence à l'écran, et il ne faut jamais réfléchir très longtemps avant de débloquer une situation qui pouvait sembler compliquée au départ. Les possibilités pour interagir avec le décor sont d'ailleurs assez limitées, puisque l'on ne trouve jamais vraiment de tableaux regorgeant d'éléments interactifs. Les amateurs de point and click en seront donc pour leurs frais. Bien évidemment, les moins habitués au genre aventure auront sans doute là de quoi assouvir leur curiosité. Quoi de plus normal pour des joueurs qui s'intéressent avant tout à l'histoire et au développement des personnages nous direz-vous. Seulement voilà, après une mise en bouche plutôt aguicheuse, et en dépit d'une base solide pour bâtir une bonne intrigue avec des protagonistes attachants, Silence manque quelque peu le coche. L'aventure est si courte qu'elle donne presque l'impression de se limiter à son introduction et à sa conclusion. Ici, on ne critique pas tant la durée de vie du titre, que nous estimons entre 5 et 7 heures grand maximum, mais plutôt l'impression de vide laissée par son scénario. Le manque de péripéties pour jalonner l'aventure de Noah et de sa petite sœur Renie se fait donc cruellement sentir, et c'est bien que le bât blesse.
C'est bien simple, une fois tous les personnages secondaires présentés, les événements s'enchaînent si rapidement jusqu'au générique de fin que l'on s'attend à un retournement de situation, qui viendrait faire basculer l'intrigue à la dernière seconde. Une fois de retour à l'écran titre, il faut se rendre à l'évidence, Silence échoue là où il aurait dû briller pour palier un peu à ses mécaniques de gameplay simplifiées. On aurait tant aimé en apprendre plus sur ces rebelles qui nous accompagnent, vivre une véritable épopée où les conséquences de nos choix (il y a bien des décisions à prendre) auraient pu être constatées dans l'histoire elle-même. Au lieu de cela, il faut se contenter d'un scénario très vite expédié où les héros filent droit vers leur objectif, sans qu'on leur oppose la moindre résistance. Cela n'a cependant rien d'étonnant quand on sait ce qu'est véritablement le monde de Silence ; en effet, quand on connaît les événements relatifs au premier volet (qui sont de toute façon expliqués à plusieurs reprises dans cette suite), on peut difficilement imaginer un autre déroulement. On espérait pourtant que le chemin pour atteindre le trône de la fausse reine serait parsemé d'embûches et de rebondissements, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Malgré tout, il nous a été impossible de ne pas tomber sous le charme de le petite Renie et du monde de Silence. Qui aime bien châtie bien, mais quelle déception tout de même, quelle frustration de ne pouvoir profiter plus de cet univers magique.
Ahurissant. Il n'y a pas d'autre mot pour décrire le travail réalisé sur l'aspect graphique, artistique et sonore de cette suite. C'est bien simple, depuis Uncharted 4, nous n'avions pas été aussi émerveillés par la réalisation d'un jeu vidéo, et ce quelle que soit la plateforme. La technique utilisée par le studio, pour donner aux tableaux dessinés à la main un relief et une profondeur digne d'un jeu en full 3D, est remarquable. Les personnages de polygones parviennent même à se fondre dans le décor, sans jamais dépareiller avec le reste, l'illusion étant alors totale. Devant tant de beauté, on se croirait bel et bien face aux planches d'une bande dessinée d'une extrême précision graphique. Même les animations, parfois assez limitées dans ce genre de titre, ont fait l'objet d'un réel soin, ce qui rend les personnages encore plus attachants - Renie tout particulièrement. Le design des ennemis n'est pas en reste, avec ce qu'il faut de sombre pour les rendre inquiétants, sans pour autant oublier que le jeu se destine également à un jeune public. Comme dans le premier volet, le sujet abordé est grave, et l'ambiance n'est donc pas toujours très guillerette, mais la touchante naïveté de Renie parvient à maintenir le bon équilibre. La bande son habille comme il se doit cet univers en danger, tantôt mélancolique, tantôt apaisante, et les doublages sont de très bonne facture. Un soulagement après avoir subi l'affreuse voix de Sadwick dans le volet précédent. Le jeu n'est néanmoins disponible qu'en anglais (ou allemand) sous-titré français.
Pour terminer, revenons tout de même rapidement sur les mécaniques de jeu, dont nous pensons que certains regretteront la grande simplicité. Cette volonté de rendre le jeu d'aventure plus accessible est bien sûr tout à l'honneur de Marco Hüllen, le designer principal, mais elle risque d'aller à l'encontre des fans. Ceci étant dit, bien que très abordables, les quelques énigmes vous forceront parfois à gamberger un peu avant de pouvoir les vaincre. Dans certaines occasions, ce sera plus la faute à une interaction oubliée avec Spot, la petite chenille polymorphe déjà présente dans le premier épisode. Capable de s'aplatir (pour servir de levier par exemple), de se transformer en boule (pour faire sauter l'anneau qui maintient un pont), ou d'aspirer des éléments (eau, feu, etc.), il sera au centre de plusieurs puzzles qu'il vous faudra résoudre. Il faudra aussi parfois contrôler deux personnages situés à deux endroits distincts, en utilisant un oiseau pour passer de l'un à l'autre, et travailler de concert pour avancer. Citons aussi quelques mini-jeux, comme celui qui demande de garder l'équilibre le temps qu'une jauge se remplisse, ou celui qui vous lance dans une course très spéciale contre Spot. Simples, mais néanmoins efficaces, ces mécaniques peuvent toutefois être un peu contrariées à la manette, le stick droit n'étant pas toujours d'accord pour passer d'un objet interactif à l'autre. En déplaçant le personnage pour se rapprocher dudit objet, on peut contourner ce problème, mais on aurait souhaité une ergonomie plus réactive et naturelle. Sur PC, il est évidemment possible d'y jouer à la souris.
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Bon je finirai surement par le faire, ne serait ce que pour l’incroyable claque de sa beauté -a-t-on déjà vu plus beau \o/-; mais il va me falloir un peu de temps pour ravaler mais attentes sur le gameplay et l'écriture et accepter ce qu'il est. Si je le lance maintenant ça va m'énerver.
Cela dit, je le ferai. Il est trop beau pour ne pas s'y plonger et Renie est un atout.
Merci pour votre test